Réalisé par | Christine Angot |
Pays de production | France |
Année | 2024 |
Durée | |
Genre | Documentaire |
Distributeur | Adok Films |
Age légal | 16 ans |
Age suggéré | 16 ans |
N° cinéfeuilles | 921 |
L’écrivain (elle y tient beaucoup et refuse de se qualifier d’écrivaine) Christine Angot, lauréate de nombreuses récompenses, bien connue des lecteurs et téléspectateurs francophones, a fait de l’inceste le sujet de plusieurs de ses livres ayant elle-même, dès l’âge de 13 ans, vécu l’absolu enfer avec son propre père, aujourd’hui décédé. Elle y revient avec ce documentaire, dans lequel elle confronte certains témoins de son passé à ses blessures toujours saignantes.
Précisons tout de suite ne pas être un connaisseur de l’œuvre de la romancière. Nous avons souvent pu lire ou assister à des débats houleux, à mille lieues de toute tiédeur, entre ses défenseurs passionnés et ceux qui la considèrent comme le niveau zéro de la littérature. À la télévision, où elle fut invitée à donner son avis sur de nombreux sujets, Angot a toujours paru sincère, emportée et entière, tout en se montrant parfois maladroite, intransigeante et peu encline à accepter la contradiction.
Elle raconte avoir eu l’idée de ce documentaire lors d’un passage à Strasbourg où vit encore sa belle-mère, la veuve de son bourreau, qu’elle a tenté de contacter à plusieurs reprises après trente-cinq ans de silence afin de lui exprimer ses ressentis. Munie d’une caméra, elle va donc filmer l’inimaginable première scène dans laquelle elle sonne chez cette femme qui refuse de la recevoir, met le pied dans la porte, entre de force dans l’appartement. Nous assistons à une longue, violente et poignante conversation entre une fille blessée et une épouse qui a choisi de fermer les yeux pour se préserver, et qui affirme ne pas reconnaître l’homme qu’elle a passionnément aimé. On est ici au cœur du sujet, en totale sincérité, en pleine impasse entre une personne pour laquelle parler est une douleur nécessaire et une autre, pour laquelle écouter est douloureux. Tout à sa quête, à sa colère, Christine Angot a parfois du mal à entendre la détresse et les explications tantôt sincères, tantôt dérisoires de sa belle-mère. Mais évidemment, comment le lui reprocher? Chaque personne gère son fardeau comme elle peut, du mieux qu’elle peut, à sa manière. Une légende veut que l’inceste soit le thème de L’Aigle noir et, si c’est le cas, Barbara en a fait une chanson poétique et lumineuse.
Les scènes suivantes, dans lesquelles Angot rencontre sa mère, son ex-mari qui porte lui aussi un lourd fardeau, celui de n’avoir pas su la protéger, son compagnon ou sa fille, sont moins spontanées, plus «mises en scène» et le documentaire perd donc l’impact percutant de ses vingt premières minutes. En dehors des images d’archives qui sont parfois illustratives, mais qui ont dû lui apporter un peu de paix, Christine Angot hurle sa douleur dans chaque plan, chaque voix off, même lorsqu’elle s’exprime avec calme et sérénité.
Malgré cette baisse d’intensité dans la seconde partie, Une famille est un film utile, ne serait-ce que pour se rappeler le pourcentage méconnu et ahurissant de l’inceste, et pour aider à libérer la parole et promouvoir les préventions. L’espoir et la lumière n’en sont pas absents. Les questions posées sur l’aveuglement volontaire ou non, le soutien des proches, la honte ressentie non pas par l’agresseur, mais par sa victime sont évidemment fondamentales.
Philippe Thonney
Nom | Notes |
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Philippe Thonney | 14 |
Marvin Ancian | 15 |