Jeanne du Barry

Affiche Jeanne du Barry
Réalisé par Maïwenn
Titre original Jeanne du Barry
Pays de production France
Année 2023
Durée
Musique Stephen Warbeck
Genre Drame historique
Distributeur Frenetic
Acteurs Melvil Poupaud, Johnny Depp, Pierre Richard, Maïwenn, Benjamin Lavernhe
Age légal 14 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 901

Critique

Maïwenn a déclaré avoir découvert Jeanne du Barry en visionnant Marie-Antoinette de Sofia Coppola (la favorite y était jouée par Asia Argento), et avoir toujours voulu depuis en faire l'héroïne d'un biopic. C'est chose faite avec ce film bien parti pour rafler pas mal de récompenses grâce à des décors, des costumes, une musique et une distribution cinq étoiles. Un écrin solide et somptueux qui ne recèle pas toujours, principalement dans la première moitié de l'oeuvre, un contenu à la hauteur du contenant.


Le film nous invite donc à (re)découvrir la vie de Jeanne du Barry (1743-1793), connue pour avoir été la favorite de Louis XV. Un personnage toutefois moins futile, moins simpliste qu'il ne pourrait y paraître. Roturière totale, elle va acquérir dans sa jeunesse une éducation solide, tant culturelle que religieuse. Prête à tout pour se sortir de sa condition, elle se marie avec un Comte qui va littéralement la jeter dans les bras du roi. Heureuse auprès de ce monarque qu'elle aime (et c'était réciproque), elle va apprendre tout le cérémonial de Versailles, se révéler un soutien moral fort et subira durant des années les moqueries ou les attaques de tous ceux qui, dans l'entourage du roi, la méprisent ou la jalousent. À la mort de Louis XV, elle sera d'ailleurs éjectée de la Cour sans aucun ménagement.


Tourné notamment dans le superbe décor du château de Versailles, le film est un tour de force visuel. Maïwenn, qui nous avait habitués à des images filmées caméra à l'épaule, adopte ici une mise en scène classique, académique, solennelle, qui colle à l'ambiance et au sujet. On a toutefois l'impression, et là est le dommageable, qu'elle passe son temps à se donner le beau rôle, à se mettre en valeur. Pas une scène où elle ne se soucie de nous offrir son meilleur profil. Elle n'est pas mauvaise, elle est même plutôt convaincante, même si, à l'instar de sa complice Emmanuelle Bercot, elle a toujours été meilleure cinéaste et scénariste que comédienne. On aimerait aussi que l'histoire soit plus universelle, moins exclusivement centrée sur Jeanne. Plusieurs moments trop longs s'attardent sur les interminables rituels de la Cour, et les réactions tantôt maladroites tantôt provocatrices de l'héroïne. Cela conduit à des scènes bien sages, où les sous-entendus et les scandales sont évacués au profit d'un conte de fées.


Ces quelques soucis s'arrangent franchement dans la seconde partie du récit, lorsque la grande Histoire commence à faire jeu égal avec la petite et que la condition de la femme est réellement évoquée. La dernière demi-heure, pendant laquelle la chute s'effectue, les bassesses se révèlent, l'orage menace, est vraiment intéressante. Et l'on regrette que le film se termine, car on aurait aimé voir quelques images de la suite. Rappelons que la du Barry historique, après des années d'exil, sera malgré elle rappelée par son passé... ce qui la conduira à la guillotine.


Johnny Depp, taiseux mais formidable de présence et d'humour, est excellent, en plus du plaisir que l'on a à le retrouver après quelques années d'absence dues à des ennuis maritaux et judiciaires. Il est entouré d'un casting prestigieux et judicieux, allant de Pierre Richard à Melvil Poupaud, d'India Hair à Robin Renucci. Mais l'atout du film est le décidément exceptionnel Benjamin Lavernhe interprétant La Borde, le majordome du roi qui, avec bienveillance, distance et sérieux, instruira et soutiendra Jeanne du Barry durant ses années versaillaises. En résumé, si Maïwenn tire la couverture à elle, s'il faut attendre le milieu du film pour que les tensions et l'intérêt s'emballent, Jeanne du Barry reste une oeuvre ambitieuse, solide et soignée qui tient grâce à la qualité des comédiens et à la magnificence visuelle.

Philippe Thonney

Appréciations

Nom Notes
Philippe Thonney 13