6 jours à Barcelone

Affiche 6 jours à Barcelone
Réalisé par Neus Ballús
Titre original Seis dias en Barcelona
Pays de production Espagne
Année 2022
Durée
Musique René-Marc Bini
Genre Comédie
Distributeur Xenix
Acteurs Mohamed Mellali, Valero Escolar, Pep Sarrà
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 899

Critique

Pour son troisième film, la réalisatrice catalane Neus Ballus manque de souffle. 


Pour reprendre les termes d’Houria Bouteldja, 6 jours à Barcelone narre la rencontre entre un « beauf » et un « barbare »[1]. Le « beauf », c’est Valero, plombier-électricien expérimenté et catalan « de souche ». Son entreprise prend à l’essai Moha, le « barbare », jeune marocain qui souhaite par le travail s’intégrer dans la société catalane. La réalisatrice Neus Ballus explore donc la possibilité d’une rencontre entre deux mondes et de la création d’une solidarité ouvriériste qui transcenderait les dissensions de race. Si ce fond politique et social passionnant empêche son film de tomber dans un total inintérêt, il ne sera jamais transcendé par une forme malheureusement trop plate.

La platitude, c’est avant tout celle du cadrage. Celui-ci semble trop scolaire, comme le témoigne ce besoin de créer artificiellement une empathie entre le spectateur et les deux protagonistes au moyen de plans rapprochés. Cela permet de rendre leurs affects (ceux des protagonistes) absolument limpides et donc de supprimer aux scènes toute leur opacité. Ainsi Ballus ne possède à coup sûr pas la froideur analytique d’un Ostlund. En effet, pendant que ce dernier se donne des dispositifs pour observer avec distance les conflictualités sociales, se nourrissant de leur insolubilité, Ballus manque précisément de distance et a pour but non pas d’observer, mais de résoudre la tension entre Valero et Moha. Cette passion pour la résolution et pour le lissage des relations implique presque mécaniquement une œuvre gentille, trop gentille, qui substitue l’étalage de bons sentiments à l’intensité scénique. La musique participe également à cela en recouvrant l’âpreté des situations par ce baume sonore réconfortant. En bref, le spectateur est bien trop confortable sur son siège, jamais troublé par ce film indolore.


Nous sommes cela dit maintenus réveillés par la captation documentaire qu’opère cette fiction, puisqu’il s’agit en effet d’acteurs amateurs qui jouent leurs propres rôles. Une certaine beauté réside dans la mise en lumière de ce morceau de réel : le travail quotidien de ces corps ouvriers si rarement montrés au cinéma.

Tout ceci fait de 6 jours à Barcelone un film qui n’est pas dénué de qualités, mais malheureusement trop sage pour retranscrire pleinement son sujet. On notera cela dit quelques notes d’humour bienvenues…


[1] Termes utilisés par l’essayiste Houria Bouteldja dans son ouvrage Beaufs et barbares. Le pari du nous pour désigner respectivement les prolétaires blancs et les prolétaires issus de l’immigration postcoloniale.

Tobias Sarrasin

Appréciations

Nom Notes
Tobias Sarrasin 9
Anthony Bekirov 7
Marvin Ancian 14
Geneviève Praplan 12