Houria

Affiche Houria
Réalisé par Mounia Meddour
Titre original Houria
Pays de production France, Belgique, Algérie
Année 2023
Durée
Musique Maxence Dussère, Yasmine Meddour
Genre Drame
Distributeur Cineworx
Acteurs Rachida Brakni, Lyna Khoudri, Amira Hilda Douadouda
Age légal 12 ans
Age suggéré 14 ans
N° cinéfeuilles 897

Critique

Houria est un film de danse sensible qui, au-delà de son propos littéral, allégorise de manière incarnée, la condition de femmes algériennes dont les corps doivent résister au regard masculin. Le film n’est pas manichéen, ne dénonce pas, sinon de manière kinésique et par une mise en scène intelligente et subtile.


Houria (Lyna Khoudri) est une jeune danseuse algérienne de ballet qui vit de ménages et de paris nocturnes dans la rue. Un soir, elle est agressée par un homme et en ressort traumatisée. Sa cheville subit une lourde opération qui l’empêche de poursuivre sa carrière au plus haut niveau et, le choc psychologique la rend mutique. Elle rejoint une communauté de femmes également traumatisées (notamment veuves) ou handicapées, se réapproprie son corps, leur donne des cours de danse. Le film se termine par une chorégraphie-manifeste, véritablement féministe, célébrant une vision narrativement cohérente et non dissertative de ce que l’on pourrait nommer la « sororité ».


Derrière l’apparente simplicité de ce synopsis (qui pourrait presque paraître caricatural), Mounia Meddour propose, en réalité, un film subtil et sensible sur la condition de femmes algériennes dans une société très nettement patriarcale ou plus précisément clivée : les hommes étant absents ou dehors à organiser des démonstrations de force au moyen de combats de béliers (indifféremment nommés « Obama », « Trump » ou « Ben Laden ») pendant que les femmes sont confinées, dedans, dans des salons de danse – compétition de l’apparence cette fois – ou des chambres. Mais, le fait que les hommes soient essentiellement hors-champ, que la distribution soit essentiellement féminine, ne relève pas d’un manichéisme ou d’une quelconque misandrie ; il est voulu par le sujet, celui d’une (re)mise en scène du corps féminin dont il faut se réapproprier l’image et auquel il faut redonner de la force. D’abord divertissant pour des hommes (quand il est celui d’une ballerine corsetée), lesquels sont spectateurs, et donc, là aussi, en dehors de la scène, il est finalement le lieu d’une reconstruction de soi, terrestre, immanente, filmée par une caméra féminine. On passe du loisir à la résistance d’un dehors masculin qui menace ou confine, par son regard et sa présence, l’habitation et l’incarnation au sein de la société algérienne.

Un autre point frappant est que le film, qui est à moitié en français et à moitié en algérien, n’est pas sous-titré – du moins dans la version à laquelle nous avons eu accès. Que l’on se rassure cependant, avec un personnage mutique, et les principales lignes en français, on se surprend à ne rien perdre des échanges. Mais surtout on se concentre d’autant mieux sur les corps, les gestes, les expressions et les contextes. Ainsi, malgré quelques soucis de rythme au milieu du film, l’absence d’antagonismes au sein des personnages principales, ce film est une réussite qui montre, par la performance kinésique et symbolique, bien plus qu’il n’explique ou disserte, et ce, on le répète, en toute cohérence avec des choix scénographiques intelligents et une bande-son agréable.


Jonas Pont

Appréciations

Nom Notes
Jonas Pont 14