The Pale Blue Eye

Affiche The Pale Blue Eye
Réalisé par Scott Cooper
Titre original The Pale Blue Eye
Pays de production USA
Année 2022
Durée
Musique Howard Shore
Genre Thriller, Policier
Distributeur Netflix
Acteurs Christian Bale, Charlotte Gainsbourg, Gillian Anderson, Robert Duvall, Lucy Boynton, Harry Melling
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 893

Critique

État de New York. 1830. Un soldat de l’académie militaire est retrouvé pendu en lisière de forêt. Pour ne rien arranger, son cadavre est profané. Le suicide a donc tous les atours d’un meurtre. Placé sous l’égide d’Edgar Allan Poe, le pitch de ce whodunit concocté par Scott Cooper promettait. Mais la montagne accouche malheureusement d’une bien triste souris.

 

Première entourloupe du film : ce n’est absolument pas un film d’enquête. Ou, du moins, le spectateur n’a jamais l’occasion de jouir d’un jeu de piste macabre qu’il pourrait investir de ses hypothèses. Le plaisir de se perdre en conjectures nous est ici dérobé, car Scott Cooper prend le soin de disposer un enquêteur bien trop génial pour être crédible. Augustus Landor, campé par le pénible Christian Bale, a en effet toujours un coup d’avance sur nous, à tel point qu’on est davantage mis dans la position d’admirer sa virtuosité que de véritablement enquêter.


Cela aurait pu être néanmoins une position de spectateur intéressante si l’écriture n’était pas tombée dans les clichés les plus ressassés. Landor est évidemment un enquêteur torturé et traumatisé. Viril et solitaire, mais quand même sensible. Et bien évidemment porté sur l’alcool. Bref, on a beau chercher : il n’y a pas un seul trait de son caractère qui ne provienne d’une formule toute faite. Et ce n’est pas la performance cabotine de son acteur qui viendra le sauver, tout au contraire.

Le film empire ensuite son cas en ayant l’outrecuidance de convoquer Edgar Allan Poe (Harry Melling) comme personnage. Malheureusement, Scott Cooper tue une seconde fois l’écrivain en ressortant l’archétype sclérosé de l’artiste romantique génial mais socialement inadaptéfasciné par la mort, outrancièrement mélancolique – il invite son amoureuse à faire une promenade dans un cimetière – et également alcoolique. Il apparaît de plus en plus souhaitable que le cinéma grand public cesse de tomber dans des clichés si bêtes et se mette enfin à proposer des représentations de l’artiste un peu plus concordantes avec le réel.


Pour ce qui est du récit, là encore peu de surprises. Cooper saupoudre son histoire criminelle d’occultisme et d’ésotérisme sans que cela ne soit jamais vraiment creusé. L’ambiance gothique n’est quant à elle présente qu’à titre de décorum. On aurait tant aimé que le film fût en effet Edgar Poe-esque, comme il le revendique ! Mais, alors que chez Poe le polar comporte toujours une dimension métaphysique, il est ramené ici à une bien petite chose. Il ne sert qu’à conjurer le trauma de son protagoniste à travers un twist final aussi lourd que prévisible. De manière générale, rien ne sera jamais laissé en blanc, le film ne disposera aucune béance. Sa passion première sera au contraire de tout (sur)expliquer, de tout rationaliser et, finalement, de résorber le mystère plutôt que de l’épaissir.


Enfin, malgré une lumière pas trop laide dans certaines scènes d’intérieur, force est de constater que la mise en scène ne sauve pas The Pale Blue Eye. Cooper choisit une syntaxe des plus académique, filmant ses personnages en gros plan pour indiquer leurs émotions, abusant de banals champs/contrechamps lors des scènes de dialogue et enrobant le tout avec une musique envahissante et sans éclat. Ainsi, si l’on fait froidement les comptes, il ressort de la vision de ce film le constat d’une œuvre ampoulée, empruntée à tous les niveaux et qui allonge, malheureusement, la liste des œuvres produites par Netflix que l’on oublie sitôt visionnées.

Tobias Sarrasin

Appréciations

Nom Notes
Tobias Sarrasin 6