Noche de fuego

Affiche Noche de fuego
Réalisé par Tatiana Huezo
Titre original Noche de fuego
Pays de production MEXIQUE , ARGENTINE , BRÉSIL , ALLEMAGNE, USA , SUISSE
Année 2021
Durée
Musique Jacobo Lieberman, Leonardo Heiblum
Genre Drame
Distributeur CityClub Pully
Acteurs Marya Batalla, Marya Membreño, Giselle Barrera Sánchez, Julián Guzmán Girón
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 892

Critique

Après le remarquable El lugar más pequeño, récompensé par le Grand Prix à Visions du Réel en 2012, Tatiana Huezo frappe à nouveau un grand coup. Cette fois avec une fiction poétique et puissante présentée à Cannes dans la section Un certain regard. Trois filles, trois adolescentes au cœur des violences quotidiennes subies par les populations mexicaines dans certaines régions du pays. Une histoire d’amitié, de courage et d’émancipation.

Ana, 9 ans, vit avec sa mère dans un village mexicain. L’environnement verdoyant et luxuriant qui enveloppe la communauté locale est volontiers filmé en gros plans. Malgré une forme de sérénité qui s’en dégage de prime abord, le paysage est miné par l’omniprésence des narcos. Ana, Paula et Maria partagent leurs jeux, leurs rires et leur vie d’écolière, mais l’insouciance n’est pas de mise. Elles ne sont encore que des enfants, et déjà elles sont de jour en jour plus conscientes de ce qui se trame dans les parages. Elles se rendent bien compte qu’en tant que filles, et demain que femmes, elles pourraient compter parmi les victimes des enlèvements, des meurtres ou encore des viols.

S’en vient déjà le temps des premières fois. Elles sont là, regards complices et mines rayonnantes à partager ces moments privilégiés des premiers émois amoureux. Aux scènes sombres, et parfois macabres, succèdent des moments lumineux, portés par le jeu des actrices principales tout en justesse et en délicatesse. Ces scènes douces-amères, toujours pleines de lucidité quant à la condition féminine, donnent l’impression le temps d’un instant de voir les protagonistes danser sur un volcan.

Tout comme dans son documentaire sur un hameau salvadorien et son passif durant la guerre civile, la réalisatrice parvient à plonger le spectateur dans un univers fascinant, qu’il découvre pas à pas, suivant un montage rythmé et efficace. D’abord intrigant, il se révèle de plus en plus anxiogène. C’est ici aussi dans son aspect atmosphérique et dans la construction progressive de la tension que réside la force dramatique du film.

Le rythme imprimé par l’alternance de scènes de la vie domestique, de moments de vie scolaire et des embardées des trois jeunes filles dans le village et ses environs sait tenir le spectateur en haleine. Le danger est là, potentiellement partout, diffus mais bien réel. Ce qui ne va pas sans rappeler l’ambiance de l’excellent Ixcanul (2015) de Jayro Bustamante qui dépeint la vie d’une poignée de paysans sans terres sur le flanc d’un volcan.

Avec Noche de fuego, Tatiana Huezo propose un récit soigneusement tissé et totalement maîtrisé de bout en bout. D’une facture formelle de grande qualité, sans jamais être lisse, ce film d’une grande intensité est indéniablement l’une des très bonnes surprises de ce début d’année.

Noémie Baume

Appréciations

Nom Notes
Noémie Baume 18