Juste une nuit

Affiche Juste une nuit
Réalisé par Ali Asgari
Titre original Ta farda
Pays de production Iran, France, Qatar
Année 2022
Durée
Musique Ali Birang
Genre Drame
Distributeur Xenix
Acteurs Babak Karimi, Sadaf Asgari, Ghazal Shojaei, Amirreza Ranjbaran, Nahal Dashti, Mohammad Heidari
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 890

Critique

Alors qu’aujourd’hui des manifestations agitent les rues de Téhéran (s’agissant des injustices subies par les femmes iraniennes), le cinéaste Ali Asgari nous fait partager la journée d’une fille-mère d’une vingtaine d’années, étudiante et habitant la capitale. Même si Juste une nuit (deuxième film du réalisateur) a été tourné en 2020, avant les événements mentionnés, ce long métrage s’inscrit dans cette actualité-là.

Éclairage intéressant sur les problèmes complexes qui agitent le pays, le film suit les pas de Fereshteh (excellente Sadaf Asgari, nièce du réalisateur) qui n’a que quelques heures devant elle pour régler une situation compliquée: elle doit absolument cacher à ses parents, qui vont passer la nuit chez elle, l’existence de son bébé (illégitime) de deux mois dont ils n’ont jamais entendu parler. Avec l’aide de son amie Atefeh (Ghazal Shojaei), elle se met en quête d’une «bonne âme» à qui elle pourrait confier son enfant l’espace de cette nuit-là, mais toutes deux se rendent vite compte que l’opération n’est pas facile: les femmes auxquelles elles s’adressent manquent de solidarité, se dérobent et personne n’ose aider Fereshteh. Les deux jeunes femmes vont arpenter les rues de la capitale, sans succès, n’essuyant que des refus. Les exigences du patriarcat, la corruption et les croyances religieuses s’en mêlent et les personnes contactées se défilent.

Caméra à l’épaule, le cinéaste suit les pas des deux protagonistes dans les rues et les labyrinthes de Téhéran, tandis que s’installe une tension croissante. On est à pied ou en taxi, il n’y a pas de silence, les dialogues sont directs, les visages expressifs, et la mise en scène réussit à créer une atmosphère d’urgence, anxiogène par moments, plusieurs séquences renvoyant à une forme de «néoréalisme iranien» de qualité. Le tempo du film est dans l’ensemble bien maîtrisé, les actrices et les acteurs assument avec intelligence des rôles souvent difficiles.

Portrait d’une jeune femme qui cherche à briser les chaînes de traditions bien installées dans son pays, Juste une nuit ne débouche pas sur une perspective très optimiste (les images et les actualités télévisées que l’on découvre sur nos écrans non plus…) Le réalisateur dit avoir dû composer avec la censure imposée dans son pays - le film en porte sans doute quelques traces (cachées) -, mais il semble avoir réussi à contourner une bonne part des difficultés: peut-être le message aurait-il pu être plus clair, plus incisif, mais les séquences sont révélatrices de la solitude des femmes et la décision finale de Fereshteh implique un certain engagement de sa part. De toute façon, il reste encore bien des choses à faire…

Antoine Rochat

Appréciations

Nom Notes
Antoine Rochat 15