Mon pays imaginaire

Patricio Guzmán a réalisé plusieurs documentaires sur l’histoire politique de son pays, le Chili, du gouvernement pacifiste de Salvador Allende au coup d’État dictatorial mené par Augusto Pinochet. Il traite cette fois-ci de la deuxième révolution qu’il a connue, celle d’octobre 2019, lorsque le peuple de Santiago a manifesté en masse pour réclamer plus de démocratie et de dignité suite à l’augmentation drastique du prix des tickets de métro. Pour ce faire, le réalisateur choisit trois axes. Il filme d’une part les événements qui se sont déroulés dans les rues, et qui ont abouti au référendum de 2020. Il y mêle d’autre part des images d’archives de sa première expérience avec la rébellion dans les années 1970, afin de mener une réflexion sur ce qui a changé ou non. Et troisièmement, Guzmán nous offre une multitude de points de vue, tous féminins, sur la situation, par le biais de nombreuses interviews. Il est intéressant d’entendre les expériences et perspectives de femmes participant de près (manifestante de la première ligne, médecin secouriste, photographe, pour ne citer qu’elles) ou de loin (politologue, journaliste, écrivaine, etc.) aux événements révolutionnaires. Il est également impressionnant et parfois choquant de voir des images de manifestations non filtrées par le prisme de médias plus «traditionnels» comme la télévision. Même si Guzmán est évidemment un spécialiste du sujet, il arrive à le rendre clair et compréhensible pour des spectatrices et spectateurs qui n’auraient pas des connaissances aussi poussées que lui. Et au vu du rejet qu’a connu le projet de nouvelle Constitution au Chili en septembre dernier, le visionnement de ce documentaire, pourtant porteur d’espoir, est d’autant plus touchant.