Ennio

Affiche Ennio
Réalisé par Giuseppe Tornatore
Titre original Ennio, il maestro
Pays de production Italie
Année 2022
Durée
Musique Ennio Morricone
Genre Documentaire
Distributeur Filmcoopi
Acteurs Ennio Morricone, Giuseppe Tornatore, Marco Bellocchio, Bernardo Bertolucci, Dario Argento, Giuliano Montaldo
Age légal 8 ans
Age suggéré 12 ans
N° cinéfeuilles 885

Critique

Disparu en 2020, le Maestro Morricone n'a évidemment pas travaillé qu'avec Sergio Leone même si, dans l'inconscient collectif, les noms de ces deux génies sont indissociables. Il aura composé la musique de 500 films, sans compter ses nombreuses autres contributions. Giuseppe Tornatore (Cinema Paradiso, Une pure formalité, La légende du pianiste sur l'océan), ayant collaboré avec le compositeur durant plusieurs décennies, lui consacre un documentaire somptueux, indispensable et étourdissant.


Que dire, et comment le dire ? Il y a des voluptés, des enchantements, qui sont difficilement traduisibles en mots, comme celui dans lequel on baigne en sortant de la projection de ce magnifique documentaire exacerbant l'amour de la musique, du cinéma... et de la musique au cinéma. Ennio vous passionnera certainement même si vous n'êtes pas spécialiste de l'œuvre morriconienne et que vous n'avez pas vu la plupart des films qu'il a accompagnés voire, parfois, sublimés. Le réalisateur a passé des mois à interviewer le maestro lui-même, mais aussi de nombreuses personnalités (de Clint Eastwood à John Williams, de Dario Argento au Roland Joffé de Mission en passant par Bruce Springsteen et Quincy Jones), ayant toutes quelque chose de pertinent, d'instructif ou de cocasse à raconter. Il accumule également les extraits de longs-métrages, les images volées sur les plateaux et les documents d'archives passionnants, remontant pour certains à l'époque où le jeune Ennio faisait ses classes avec des profs aujourd'hui oubliés mais importants, et qui commença par se consacrer à la variété italienne en tant qu'arrangeur et orchestrateur. En effet, pour ses maîtres et aussi pour Ennio, au début, un compositeur se consacrant à la musique de films, autant dire qu'il faisait le trottoir. Il devint rapidement très recherché comme arrangeur et bruiteurs de chansons (la célébrissime Here's to you de Joan Baez), avant d'écrire pour ses premiers films sous un faux nom afin de ne pas décevoir ses professeurs et son amour-propre. Il finira bien sûr par faire de cette discipline méprisée un art majeur... en sachant, comme le dit l'un des intervenants, "mélanger la géométrie et le spirituel".


Les anecdotes sont aussi nombreuses que formidables, et nous ne pouvons qu'en évoquer quelques-unes pour vous laisser la joie de les découvrir : la composition mentale tout en observant simplement un piano ; le thème du Clan des Siciliens "écrivant" le nom d'un compositeur célèbre ; une collaboration avec Kubrick avortée suite à un coup bas de Sergio Leone ; des réalisateurs prestigieux allant chercher dans des navets anciens la mélodie parfaite ; le plateau d'Il était une fois en Amérique baigné de musique ; la photo de classe sur laquelle, sans le savoir, Ennio et Sergio étaient voisins…


Pédagogue et malicieux, Morricone parle avec joie de son goût pour la musique expérimentale, de son utilisation de boîtes de conserves et de machines à écrire, de sa faculté à s'adapter à chaque réalisateur. On regrette d'ailleurs que des cinéastes français tels qu'Henri Verneuil ou Edouard Molinaro n'aient pas pu, et pour cause, participer à ce documentaire. Giuseppe Tornatore nous donne, à travers Morricone, une leçon de musique, de passion, d'audace, dans un film qui est, de plus, remarquablement construit. Il évite tous les pièges qui peuvent facilement amoindrir un documentaire. Évidemment laudative puisqu'on en est à l'heure des hommages, la fin d'Ennio n'est pas mièvre mais provoque larmes aux yeux et poils qui se dressent en voyant le maestro diriger ses œuvres dans des concerts pharaoniques et ne pas en revenir de recevoir tant de bravos. Pas mal pour un enfant qui voulait faire médecine et que son père avait obligé d'étudier la musique sans lui laisser le moindre autre choix.


En sortant de la projection, nous nous disions avec un camarade chroniqueur qu’une ou deux heures de plus n’auraient pas dérangé. Pourquoi mettre comme note un 19 et pas un 20 ? On se pose encore la question, tant on est en pleine majesté. Dans tous les cas, nous espérons vous avoir donné envie de ne pas manquer ce film, et bien sûr sur grand écran

Philippe Thonney

Appréciations

Nom Notes
Philippe Thonney 19