Une urgence ordinaire

Affiche Une urgence ordinaire
Réalisé par Mohcine Besri
Titre original Une urgence ordinaire
Pays de production Maroc, Suisse
Année 2018
Durée
Genre Drame
Distributeur Outside the Box
Acteurs Younes Bouab, Rachid Mustapha, Fatima Zahra Bennacer, Youssef Alaoui, Ghalia Benzaouia, Ayoub Layoussifi
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 884

Critique

Dans son nouveau long métrage, le réalisateur helvético-marocain dénonce un système qui emprisonne les individus dans leur propre pays. L’hôpital comme métaphore d’un pays aux soins palliatifs, qui colmatent ce qui peut mais sans soigner ses blessures profondes et éradiquer ses maux.

Le visage d’un jeune homme. La caméra révèle lentement qu’il se trouve de l’autre côté de la barrière de sécurité d’un pont, au-dessus d’une autoroute. Débarque un homme, poussant une charrette. Les mots sont inutiles. À aucun moment, le vieillard tente de le dissuader. Au contraire, il désigne plutôt son paquet de cigarettes. Car oui: autant que les biens d’un homme ayant un pied dans la tombe puissent servir aux survivants. Cette séquence tragicomique inaugural donne le ton - Une urgence ordinaire sera d’un pragmatisme désespéré.

Après ce saut dans le vide, ce jeune est sauvé par la Providence: ce sont des chèvres transportées dans un camion, et non le bitume, qui amortissent sa chute. Le miraculé, bien malgré lui, est ensuite acheminé à l’hôpital public de Casablanca. C’est dans cet hospice - d’ailleurs un personnage à part entière de ce film -, cette cour des miracles, que vont se réunir les déshérités du système, qui doivent monnayer la santé de leur proche pour espérer avoir accès à des soins dignes de ce nom. La caméra suit tour à tour une galerie de personnages, qui se noue autour de Ayoub, 6 ans, atteint d’une tumeur au cerveau. Ses parents, modestes pêcheurs, ont quitté leur village pour soigner leur enfant.

Loin d’un mélodrame à blouse blanche, ce huis clos hospitalier dresse le portrait d’un Maroc gangréné par la corruption, avec une dramaturgie sobre et une belle photographie. Plans-séquences et gros plans parviennent à nous emmener et nous immerger dans ce service d’urgences, pour mieux mettre en lumière l’humanité des drames ordinaires et quotidiens qui se trament entre les murs de cette institution publique, abandonnée par l’État. Comme ce système de santé défaillant, Une urgence ordinaire dénonce ce pays qui fonctionne à deux vitesses, délaissant les plus démunis et participant à leur chute. Malgré ce reflet sombre de cette réalité sociale se dégage pourtant une poésie. Les comédiens et la mise en scène sensibles soulignent cette force et ce sentiment de révolte contre un système socio-politique défaillant, avec des traits d’humour pour contrebalancer la noirceur de cette réalité contemporaine.

Noémie Desarzens

Appréciations

Nom Notes
Noémie Desarzens 16