Loving Highsmith

Affiche Loving Highsmith
Réalisé par Eva Vitija
Titre original Loving Highsmith
Pays de production FRANCE, SUISSE, ALLEMAGNE
Année 2022
Durée
Musique Noël Akchoté
Genre Documentaire
Distributeur Filmcoopi
Age légal 12 ans
Age suggéré 12 ans
N° cinéfeuilles 876

Critique

Une réalisatrice bâloise signe ce beau documentaire sur Patricia Highsmith. L’écrivaine texane, morte au Tessin en 1995, y apparaît dans une grande solitude.

Écrire est une façon de vivre la vie qu’on n’a pas eue, dit en substances la créatrice du personnage de Tom Ripley. La vie rêvée, la vie vécue… la deuxième courant sans cesse derrière la première… Le fait est que Patricia Highsmith n’a pas connu la tendresse d’un foyer heureux. Vivant chez ses grands-parents, au Texas, les six premières années de sa vie, elle n’a vraiment connu sa mère que lorsque celle-ci l’a ramenée avec elle à New York. Dès lors, elle s’est employée à se faire aimer, puis à faire accepter son homosexualité. La vie dont elle a rêvé a été celle de relations heureuses, libres, sereines. Elles se retrouvent dans le premier roman «de femmes», Carol, publié en 1952 sous le pseudonyme de Claire Morgan. Il était alors impossible à la société d’accepter qu’un roman de ce type se termine bien.

Mais deux années plus tôt, il y a eu L’Inconnu du Nord-Express, son premier roman publié avec un tel succès qu’Alfred Hitchcock l’a aussitôt adapté pour le cinéma (1951). À 30 ans, Patricia Highsmith peut savourer sa célébrité, se consacrer à l’écriture et à une vie amoureuse mouvementée. Ce qu’elle ressent au fond d’elle-même apparaît peu dans son œuvre; elle ne le confie qu’à ses carnets intimes, restés dans la maison tessinoise où elle a passé les dernières années de sa vie. Ce sont eux qu’a retrouvés la dramaturge, scénariste et réalisatrice bâloise Eva Vitija. Leur richesse avait de quoi alimenter un film, révélant une vie et une personnalité mal connues.

Eva Vitija lit et sélectionne dans ces carnets la trame de son film. Non pas le personnage complet, avec sa part d’ombre et ses troubles, mais essentiellement la vie amoureuse lesbienne que Patricia Highsmith recachait surtout pour ne pas nuire à sa carrière. La réalisatrice retrouve certains proches de l’écrivaine, sa famille, ses connaissances, ses amantes qui apportent d’autres confidences. Gwendoline Christie prête parfois sa voix à l’écrivaine, mais celle-ci est très présente à travers les archives et les entretiens qu’elle a accordés, pas toujours de gaieté de cœur.

Se révèlent au fil des plans, un caractère complexe, des souffrances muselées derrière les fêtes et les démonstrations de joie, des rencontres fortes, des sentiments refoulés par la nécessité des conventions sociales. Une grande solitude, en fin de compte, dissimulée derrière les murs de maisons enfouies dans la verdure et peuplées de chats. Loving Highsmith est un documentaire sensible et généreux, avec des séquences joliment reliées par une animation qui mime le geste de l’écriture. Car si Highsmith a consacré sa vie à en écrire une autre, elle avoue aussi préférer être seule pour privilégier l’inspiration des histoires dont elle a fait sa célébrité.

Geneviève Praplan

Appréciations

Nom Notes
Geneviève Praplan 15