Serre Moi Fort

Affiche Serre Moi Fort
Réalisé par Mathieu Amalric
Titre original Serre Moi Fort
Pays de production France
Année 2020
Durée
Genre Drame
Distributeur CityClub Pully
Acteurs Vicky Krieps, Arieh Worthalter, Anne-Sophie Bowen-Chatet, Sacha Ardilly, Juliette Benveniste, Aurèle Grzesik
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 871

Critique

Après les deux très belles rencontres qu’étaient La Chambre bleue (2014) et Barbara (2017), l’envie était grande de retrouver Mathieu Amalric-cinéaste. Et la sensibilité, la poésie sont toujours là, magnifiées par la présence de Vicky Krieps.

Une femme quitte la maison familiale en voiture et part sur les routes dans ce qui semble être un voyage sans fin, sans lieux. Rien de comparable à celui qui se déroule en elle, au fil des souvenirs, des images d’un mari et de deux enfants désormais loin derrière elle. Elle imagine une vie qui se poursuit sans elle, indifférente à la sienne, qui se fait désormais sans eux. Les progrès au piano de sa fille, les cabanes dans les arbres de son fils, les tentatives de son compagnon pour oublier son absence: ces êtres l’accompagnent partout où elle va. Mais jusqu’où pourra-t-elle aller?

Frappe d’emblée la capacité du réalisateur à faire exister la matérialité des choses, déjà présente dans ses œuvres précédentes. La lumière qui caresse les visages et les meubles, les objets qui parsèment les pièces, alors même qu’ils sont pris dans des compositions en partie floues, vibrent d’une intensité peu courante. Loin d’être simplement là pour évoquer un quotidien, un espace, ils sont marqués par la vie, par les mouvements des interprètes. Le son lui-même, qu’il soit musique ou parole, en faisant le pont entre ces êtres séparés, se voit conférer une existence particulière, presque en parallèle de l’image.

Cette incarnation peut apparaître paradoxale pour ce qui est finalement une histoire de fantômes ou en tout cas de pure imagination. Mais comme le réalisateur le disait lors d’une interview, il y a de cela dans la magie du cinéma: donner à voir et à ressentir comme vrai quelque chose qui n’est pas là. Alors, Serre moi fort devient aussi un très beau regard sur la perte, celle qui déchire le cœur et le ventre mais qui explose par ailleurs d’amour et de vie. L’idée que celles et ceux qui sont absents peuvent exister avec plus de force que tout le reste dans nos pensées et nos gestes. Si peu de choses, un signe infime, suffisent alors à les faire se déployer dans nos yeux: un morceau de piano, un briquet, une chambre, une parole. La relation, entre tendresse et reproches, se poursuit bien après la séparation. Et c’est ce délicat équilibre entre douleur abyssale et confiance lumineuse que Mathieu Amalric et la décidément, indiscutablement, totalement sublime Vicky Krieps inscrivent au plus profond de chaque plan.

Adrien Kuenzy

Appréciations

Nom Notes
Adrien Kuenzy 15
Marvin Ancian 17
Georges Blanc 18
Adèle Morerod 15
Sabrina Schwob 14