Les Leçons Persanes

Affiche Les Leçons Persanes
Réalisé par Vadim Perelman
Titre original Persian Lessons
Pays de production Russie, Allemagne, Biélorussie
Année 2019
Durée
Musique Evgueni Galperine
Genre Historique, Drame, Guerre
Distributeur KMBOFrenetic
Acteurs Nahuel Perez Biscayart, Leonie Benesch, Lars Eidinger, Alexander Beyer, Jonas Nay, Luisa-Céline Gaffron
Age légal 12 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 870

Critique

Non, ce n’est pas un film de plus sur la Deuxième Guerre mondiale, les camps et les nazis. Vue à l’échelle d’un homme et non à celle de millions de personnes ou de plusieurs nations, cette histoire à la fois simple et étonnante est une belle surprise de cinéma, magnifiquement racontée par un formidable duo de comédiens.

L’action se situe en 1942, dans la France occupée. Gilles (Nahuel Pérez Biscayart) est un fugitif juif et belge qui est arrêté par les Allemands. A la suite d’un incroyable coup du sort, son physique aidant, il va prétendre être un ressortissant de Perse. Cela sauvera Gilles de la mort inéluctable qui l’attend. On le présente en effet à l’officier Klaus Koch (Lars Eidinger), l’un des responsables d’un camp de transit, qui projette de s’installer à Téhéran après la guerre et cherche justement quelqu’un pour lui enseigner le farsi. Pendant des mois, la peur au ventre d’être démasqué, Gilles, qui n’a évidemment aucune notion de cette langue, va inventer des mots, une syntaxe et une calligraphie qu’il devra enseigner (et retenir!) à cet officier qui a tout pouvoir sur lui.

Malgré une intrigue qui, dans sa durée, peut être qualifiée d’improbable, Les Leçons persanes de Vadim Perelman tient formidablement la route. Grâce tout d’abord à une reconstitution soignée, tant dans les décors que dans les costumes ou les paysages. Ensuite, le récit devient de plus en plus prenant, même si l’on oublie parfois que Gilles peut être arrêté à tout moment. Le film prend en effet une autre direction, reposant progressivement sur la relation étrange qui se noue entre les deux personnages. L’humour n’est pas absent, faisant d’ailleurs parfois jeu égal avec la tension, notamment dans la scène finale ou le pathos se confond avec l’absurde. La guerre n’est toutefois pas qu’un prétexte pour rendre l’histoire plus forte: le film la représente dans sa triste absurdité plutôt que dans son gigantisme ou son horreur sanglante. C’est aussi sur la complexité de l’humain, l’instinct de survie et les conséquences du mensonge que le film nous invite à réfléchir. Cette démarche culmine lors d’une scène où l’officier Koch, croyant s’exprimer en farsi, décline les prénoms de prisonniers juifs morts dans son camp.

Ce n’est pas la première fois qu’un cinéaste pose sur la Deuxième Guerre mondiale un regard nouveau, en s’autorisant étrangeté et humour. On pense évidemment à La Vie est belle de Roberto Benigni où le public pouvait même éclater de rire, ce qui n’est pas le cas ici.

Nahuel Pérez Biscayart, vu dans 120 battements par minute de Robin Campillo ou Au revoir là-haut d’Albert Dupontel, présente un mélange touchant de faiblesse et de résilience, de courage et de résignation. Face à lui, Lars Eidinger, prodige du théâtre allemand, qui affole toutes les scènes européennes avec ses interprétations de Shakespeare, compose un officier à la fois terrifiant et pathétique. Grâce à eux et à un scénario original fort bien écrit, Les Leçons persanes captive, malgré quelques moments tire-larmes (pas trop, heureusement) pas indispensables.


Philippe Thonney

Appréciations

Nom Notes
Philippe Thonney 15