Matlosa

Affiche Matlosa
Réalisé par Villi Hermann
Titre original MATLOSA (THE HOMELESS ONE)
Pays de production SUISSE
Année 1981
Durée
Musique Enzo Jannacci
Genre Comédie
Acteurs Flavio Bucci, Francesca De Sapio, Omero Antonutti
Age légal 14 ans
Age suggéré 14 ans
N° cinéfeuilles 869

Critique

Le film captive parce que chacun peut se reconnaître en son personnage principal, Alfredo. Et surtout parce que celui-ci possède cette richesse rare d’avoir su conserver son enfance.

Ce film est sorti en 1981. Quarante ans plus tard, il semble parler d’aujourd’hui tant ce délicieux portrait d’employé de bureau touche à l’universalité. L’employé de bureau? C’est Alfredo (Omero Antonutti) qui travaille à Lugano, peut-être dans une banque. Mais c’est pendant le week-end qu’il vit vraiment, lorsqu’il regagne le fond de vallée où il a vécu petit garçon. Il peut alors oublier la réorganisation de son entreprise et retrouver le village qui hante ses souvenirs, son ancienne maison, le mur qu’il y maçonne, la chasse aux escargots… Alfredo impose sa destination à sa femme (Francesca De Sapio) et à ses enfants qui s’y plient de bonne grâce. Même s’ils préféreraient aller au bord de la mer…

Né à Lucerne en 1941, Villi Hermann a l’âme tessinoise par sa mère. Il s’est installé à Lugano après des études qui ont fait de lui un cinéaste polyvalent, aussi bien cameraman que technicien, réalisateur ou producteur. Imago film, sa maison de production, est reconnue pour la qualité de son travail. Hermann s’est consacré au documentaire, avant de se lancer dans la fiction, au tournant des années 80. Matlosa, l’un de ses premiers longs métrages, a été présenté en compétition à la Biennale de Venise en 1981.

Le générique résume le film en trois séquences. La première cadre des mains qui s’ennuient et jouent avec des crayons à papier. La deuxième remonte le temps jusqu’à un homme (Flavio Bucci) poursuivi dans la montagne par la police. Enfin voici quelques vieilles photos; on y reconnaît l’homme recherché, un homme étrange au costume défraîchi, escorté d’un petit chien ébouriffé. C’est le «matlosa», terme qui désigne un vendeur ambulant, un sans-abri, un vagabond, voire un voleur. Le titre du film le décrit: Matlosa, ou l’histoire vraie de Policarpo Sperandio qui portait la cassette à droite. Ici, le matlosa est donc un colporteur. Peut-être est-il le père d’Alfredo, peut-être seulement son ami. Son statut n’est pas clairement défini. En tout cas, l’homme a façonné l’enfant qui ne l’oubliera jamais.

«Notre cinéma doit parler de nous-mêmes», explique Villi Hermann. C’est parce qu’il y réussit que son film est si attachant. Matlosa n’a rien d’une autobiographie, il évoque ce que chacun peut ressentir comme une routine, à n’importe quelle époque. Alfredo vit cela très consciemment; mais, lorsqu’il revient dans son village, il revoit l’enfant qu’il a été et, malgré la pauvreté d’alors, cela renouvelle en lui l’enchantement de l’innocence.

Cependant, ne fait-il pas preuve de passéisme? Oh, certainement pour sa famille et ses contemporains! Pourtant le propos est tout autre: il s’agit de savoir choisir sa vie. Et des années plus tard, alors qu’on mesure mieux les travers de la société, son goût pour la compétition et ses exagérations consommatrices, cet homme plein d’amour et d’humour explique à qui veut l’entendre que le bonheur est plus généreux près des sources et des forêts que dans les grands magasins.

Geneviève Praplan

Appréciations

Nom Notes
Geneviève Praplan 15