Un héros

Affiche Un héros
Réalisé par Asghar Farhadi
Titre original Ghahreman
Pays de production Iran, France
Année 2021
Durée
Genre Thriller, Drame
Distributeur Filmcoopi
Acteurs Sarina Farhadi, Amir Jadidi, Fereshteh Sadre Orafaee, Mohsen Tanabandeh, Sahar Goldust, Ehsan Goodarzi
Age légal 14 ans
Age suggéré 14 ans
N° cinéfeuilles 869

Critique

À travers ce film, le réalisateur iranien poursuit son exploration critique de la société iranienne dans un thriller psychologique qui n’est pas sans évoquer le mythe d’Icare.

Une permission de deux jours est octroyée à Rahim (Amir Jadidi), emprisonné pour incapacité à rembourser un ancien garant et ex-beau-frère, qui avait cherché à l’aider au moment où il tentait, en tant que calligraphe, d’ouvrir son propre commerce.

Dans l’une des premières séquences du film, le protagoniste entame avec peine une interminable montée sur des échafaudages, dans une nature désertique où le mari de sa sœur effectue des fouilles archéologiques. Cette ascension est à l’image de son ambition: amasser suffisamment d’argent pour ne pas avoir à retourner en prison. Comme les ailes d’emprunts d’Icare, fabriquées avec de la cire et des plumes, Rahim devra, pour y parvenir, reconstruire la vérité.

Après que sa petite amie, qu’il prétend marier à sa sortie de prison, a trouvé un sac à main plein de monnaies d’or, il tente de convaincre son créancier d’accepter une partie de sa dette, lui promettant de rembourser le reste après. Le refus de ce dernier fait émerger une nouvelle idée dans l’esprit du protagoniste: mettre des annonces dans la rue signalant qu’il a retrouvé le sac, en donnant le numéro de téléphone de la prison, pour que son geste soit apprécié à sa juste valeur et qu’une faveur lui soit ainsi potentiellement octroyée…

La supercherie fonctionne, les responsables de la prison et les médias veulent l’ériger en héros, même s’il avertit au début ne pas avoir trouvé lui-même le sac. Tournés en faits véridiques par les médias, ses mensonges, qu’il façonne avec zèle, le conduiront à sa condamnation ce que rappellent les compositions de plans où il figure toujours devant des barbelés des barreaux ou des murs.

Asghar Farhadi, qui a obtenu avec Un héros le Grand Prix ex æquo au dernier Festival de Cannes, excelle dans le doute qu’il parvient à créer: s’il n’y a pas de stricte équivalence entre les faits et le récit de Rahim, celui-ci a un regard si tendre et bienveillant, une forme de naïveté, dont on ne voudrait surtout pas qu’elle cache de la manipulation. Pourtant les grains de sable qui enraient la machine à croyances s’accumulent. Alors ceux qui étaient considérés comme des bourreaux, le créancier notamment, acquièrent un peu d’humanité tandis que Rahim semble être la victime de différents intérêts, ceux notamment des fonctionnaires de la prison qui veulent montrer patte blanche à la suite du suicide de plusieurs prisonniers ou d’une association caritative qui craint d’être décrédibilisée… Dans sa chute, il entraînera plusieurs personnes de son entourage, dont son fils bègue, qui a pour fonction d’attendrir les cœurs par sa difficulté à parler. Cela ne l’empêche pas, de tenir tout contre lui en marchant, le certificat de confiance délivré à son père dans une des séquences touchantes du film.

L’origine de tous ces malheurs, au final, est son impossibilité, malgré sa bonne volonté, à trouver du travail pour rembourser son créancier. Mais qu’importe, paraît vouloir dénoncer le réalisateur: Rahim est puni pour s’être risqué d’endosser le rôle de metteur en scène, forcé par la situation à créer de la fiction, à reconstruire artificiellement le vrai en demandant à ses proches d’entrer dans des rôles qui ne sont pas les leurs. Rahim est donc broyé par un système qui le contraint à subir, sous forme de fatalité, en destin duquel il ne peut se détourner.

Sabrina Schwob

Appréciations

Nom Notes
Sabrina Schwob 15
Marvin Ancian 13