L'Homme qui a vendu sa peau

Affiche L'Homme qui a vendu sa peau
Réalisé par Kaouther Ben Hania
Titre original The Man Who Sold His Skin
Pays de production Tunisie, France, Belgique, Suède, Allemagne
Année 2019
Durée
Musique Amine Bouhafa
Genre Drame
Acteurs Monica Bellucci, Darina Al Joundi, Saad Lostan, Yahya Mahayni, Dea Liane, Koen De Bouw
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 865

Critique

Présenté à la Mostra de Venise en 2020, puis propulsé dans la course pour l’Oscar du meilleur film international, L’Homme qui a vendu sa peau passe au vitriol le milieu de l’art contemporain à travers le parcours d’un jeune réfugié.

Sam (Yahya Mahayni) a été contraint de fuir sa Syrie natale pour se réfugier au Liban. Il a laissé derrière lui la femme dont il est amoureux, Abeer (Dea Liane), que sa famille a ensuite poussée à se marier avec un diplomate en poste en Belgique. Souhaitant la rejoindre pour la reconquérir, Sam se met en quête d’un visa européen. Il obtient ce sésame après avoir fait la connaissance de l’artiste Jeffrey Godefroi (Koen De Bouw), qui lui fait une proposition méphistophélique: si le jeune homme lui vend la peau de son dos pour qu’il y tatoue une toile, il lui offrira en échange la possibilité de séjourner en Europe sans être inquiété. Sam accepte, et l’artiste grave sur son dos l’image d’un visa de l’espace Schengen, prétendant ainsi dénoncer la transformation de l’être humain en marchandise dans le cadre de la crise migratoire. Sam suit Jeffrey à Bruxelles, et réalise bien vite qu’il lui a vendu bien plus qu’un carré de peau: le contrat qu’il a signé oblige le jeune réfugié à passer ses journées dans un musée, en tant que véritable œuvre d’art vivante. Totalement réifié, Sam subit des humiliations à répétition et sa dignité humaine est profondément mise à mal.

A travers cette inversion du mythe de Pygmalion - le sculpteur qui désire que sa statue de pierre prenne vie devient ici un créateur qui tente de réduire un homme au rang d’objet - la cinéaste tunisienne Kaouther Ben Hania propose une critique croisée de la gestion actuelle du phénomène migratoire et du milieu de l’art contemporain. Si le premier thème est traité de manière originale, le long métrage pointant l’intolérance masquée des Occidentaux, et surtout l’inévitable solitude dans laquelle est plongé tout migrant arraché à sa terre, le second peine parfois à éviter certains clichés: le discours grandiloquent de l’artiste mégalomane, la froideur bourgeoise de son assistante (campée par Monica Bellucci) ou les faces rougeaudes et grasses des acheteurs sont autant de lieux commun de la satire de l’art contemporain parfois lourdement mobilisés par le film.

Malgré ce léger bémol, le film brille indéniablement par sa forme. On saluera donc en conclusion sa réalisation particulièrement soignée, passant habilement de cadrages très larges et symétriques à la proximité que permet le gros plan, et soutenue par des morceaux de musique classique soulignant habilement l’ambiance mi-feutrée, mi-glaçante des salles d’exposition qui accueillent le corps tatoué de Sam.

Noé Maggetti

Appréciations

Nom Notes
Noé Maggetti 15
Serge Molla 18