Pleasure

Affiche Pleasure
Réalisé par Ninja Thyberg
Titre original Pleasure
Pays de production Suède
Année 2020
Durée
Musique Karl Frid
Genre Drame
Distributeur Xenix
Acteurs Sofia Kappel, Revika Reustle, Evelyn Claire, Chris Cock, Dana DeArmond, Kendra Spade
Age légal 18 ans
Age suggéré 18 ans
N° cinéfeuilles 865

Critique

Le monde de la pornographie du point de vue d’une débutante assoiffée de célébrité: voilà la proposition de Pleasure. Parfois très sombre et cru, ce film ne critique pas le genre auquel il s’intéresse, mais son industrie.

Linnéa (Sofia Kappel), adoptant le pseudonyme de Bella Cherry, quitte sa Suède natale dans le but de devenir une star du porno aux États-Unis. À seulement 19 ans, la jeune fille creuse petit à petit son trou dans le milieu, quitte à en explorer des facettes moins charmantes…

Lors de l’entrée de Bella sur le territoire américain, le douanier lui demande si elle vient pour le «business» ou le «plaisir». La question est plutôt ironique, puisque l’industrie du cinéma pornographique est connue pour mélanger les deux. Ou du moins en apparence, car la plongée dans les coulisses de ce monde nous fait prendre conscience de son côté obscur. Certaines scènes illustrant les déboires de Bella lors de tournages de films plus «brutaux» sont d’ailleurs éprouvantes à regarder. Ce n’est pas la dimension crue et sexuelle du film qui choque, mais la violence qu’il dépeint, celle présente dans les images que tourne l’héroïne certes, mais aussi et surtout celle qui se déroule en parallèle sur les plateaux. La réalisation établit à ce sujet une comparaison intéressante entre deux tournages «hard», l’un avec une réalisatrice et l’autre avec un réalisateur, exposant ainsi la toxicité masculine régnant dans l’industrie (thème qui domine le récit dans sa deuxième partie).

Le porno étant un genre cinématographique revêtant toujours un certain parfum de scandale, Pleasure lui enlève sa part de mystère pour le rapprocher du cinéma plus «conventionnel» dont il n’est finalement pas si éloigné, surtout en ce qui concerne le traitement qu’il réserve à ses intervenants. En effet, le parcours de Bella s’apparente à ce que l’on peut voir dans d’autres œuvres sur des acteurs et actrices peinant à se faire une place à Hollywood, devant user de culot et de réseautage pour réussir à percer. L’univers cinématographique dont il est question ici recèle également de personnes bienveillantes comme enclines à l’exploitation de ses poulains. Pleasure se révèle, à cet égard comme à d’autres, pleins de contrastes et de dichotomies. Par exemple, les acteurs «hard» (contrairement aux réalisateurs et agents) sont violents dans leurs paroles et leurs gestes lorsqu’ils tournent mais se montrent très professionnels et attentionnés hors caméra, comme si la pornographie les transformait.

Le personnage de Bella également est construit de manière ambivalente: la jeune fille souhaite aider sa collègue et colocataire, mais son obsession pour la réussite et la célébrité l’emporte souvent sur l’amitié. Cette ambition se dévoile dès le début du récit, lors du premier porno dans lequel Bella joue: d’abord désarçonnée devant le sexe de son partenaire à l’écran, la protagoniste ne commence à exprimer du désir que lorsque la caméra s’approche d’elle. La réalisatrice Ninja Thyberg s’étant immergée dans le milieu et ayant fait appel à plusieurs acteurs et actrices pornographiques pour son film, il y a fort à parier que la teinte réaliste de ce dernier (la réalisation prenant parfois des airs de documentaire) est bien fondée. Pleasure ne constitue pas une condamnation (ni une apologie) de la pornographie en elle-même, il critique plutôt l’ambition démesurée et le pouvoir masculin toxique qui dominent son industrie, comme de nombreuses autres d’ailleurs.

Amandine Gachnang

Appréciations

Nom Notes
Amandine Gachnang 15
Marvin Ancian 13
Adrien Kuenzy 12