Deux

Affiche Deux
Réalisé par Filippo Meneghetti
Titre original Deux
Pays de production France, Luxembourg, Belgique
Année 2018
Durée
Genre Drame, Romance
Distributeur First Hand Films
Acteurs Barbara Sukowa, Léa Drucker, Martine Chevallier, Hervé Sogne, Jerome Varanfrain, Muriel Bénazéraf
Age légal 12 ans
Age suggéré 14 ans
N° cinéfeuilles 860

Critique

Porté par un duo d’actrices magnifiques, ce récit de deux amoureuses contraintes de cacher leurs sentiments au regard du monde et que la maladie sépare est à la fois tragique et émouvant. Parsemé de métaphores et de subtilités scénaristiques, ce premier film est une réussite.

Nina (Barbara Sukowa) et Madeleine (Martine Chevallier) vivent une histoire d’amour secrète depuis plus de 20 ans. Alors qu’elles décident de partir s’installer à Rome afin de profiter de leur relation au grand jour, Madeleine ne peut se résoudre à annoncer la nouvelle à ses enfants, qui ignorent tout de cette passion cachée. Tour tragique du destin, Madeleine subit un accident vasculaire cérébral et les plans des deux femmes sont anéantis. Nina, reléguée au statut de voisine de palier aux yeux des proches de son amante, ne peut alors pas s’occuper de cette dernière librement. Comment récupérera-t-elle la place qui est la sienne?

Alors que dans Amour (2012) Michael Haneke explorait les répercussions de la maladie et du vieillissement sur les relations intimes, l’Italien Filippo Meneghetti choisit ici de s’intéresser à une forme d’amour qui reste encore «tabou» et peu illustré au cinéma; celui unissant deux femmes d’âge mûr. Le cinéaste, qui signe son premier film, relève magnifiquement le défi, proposant une œuvre subtile et poignante qui évite tous les écueils du tire-larmes. Certes, certains passages se révèlent quelque peu répétitifs – même si la répétition est aussi nécessaire pour asseoir la crédibilité du récit. La séquence d’ouverture – montrant deux petites filles, l’une vêtue d’une robe blanche et l’autre d’une robe noire, jouant à cache-cache avant que la première ne se noie – reste aussi trop inexpliquée. Le spectateur pourra toutefois choisir de l’interpréter de différentes manières, comme une métaphore. En y voyant, par exemple, l’idée du secret, du tiraillement entre deux vies ou facettes de soi-même, de la sensation de ne pas vivre pleinement ou encore de «tuer» une partie de soi qui n’est qu’une illusion pour sauver les apparences.

Les deux actrices principales sont impeccables et très touchantes, mais Barbara Sukowa, qui incarne Nina, est particulièrement sublime. On ne peut qu’admirer le courage de sa protagoniste, sa détermination et sa dévotion envers celle qu’elle aime, qui ne tarissent jamais malgré les obstacles. Elle prouve que la flamme de la passion ne s’éteint jamais avec le passage des années et que les héroïnes «badass» peuvent se trouver dans toutes les catégories d’âge.

 Le silence, celui de Madeleine, est aussi très prégnant durant tout le film. Il est d’abord volontaire car celle-ci ne parvient pas à faire son coming out à sa fille, dont elle est proche, ni à son fils, qui lui reproche l’échec de sa relation avec son père. Puis le silence devient subi à la suite de son AVC qui l’empêche de parler. Les gestes d’affection envers sa partenaire, qui devaient être dissimulés avant le drame, deviennent alors son seul moyen d’affirmer sa conscience et de redevenir elle-même. Dans un mouvement d’inversion et presque de métamorphose, ce dont elle avait honte se transforme en arme contre sa maladie et contre la cage dans laquelle son entourage veut l’enfermer. Une cage dont elle verrouillait elle-même la porte auparavant. Deux est ainsi une belle histoire de libération, sur plusieurs points.

Amandine Gachnang

Appréciations

Nom Notes
Amandine Gachnang 16