Billie Holiday, une affaire d'état

Affiche Billie Holiday, une affaire d'état
Réalisé par Lee Daniels
Titre original The United States Vs. Billie Holiday
Pays de production U.S.A.
Année 2020
Durée
Musique Kristopher Bowers
Genre Biopic, Musical, Drame
Distributeur Ascot Elite
Acteurs Garrett Hedlund, Trevante Rhodes, Andra Day, Leslie Jordan, Miss Lawrence, Adriane Lenox
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 859
Bande annonce (Allociné)

Critique

Entre réécriture de l’histoire et portrait intime, le biopic de Lee Daniels sur celle que l’on surnomma «Lady Day» peine à trouver sa voie. Mais il révèle la sublime Andra Day, dans son premier rôle au cinéma - une rencontre que l’on n’est pas près d’oublier.

En 2020, le documentaire Billie retraçait la vie de la chanteuse, marquée par une enfance violentée et un parcours vers la gloire compliqué par la ségrégation mais parsemé de collaborations avec les plus grands musiciens de l’époque. Avec The United States vs. Billie Holiday, Lee Daniels veut dévoiler une histoire plus secrète, celle des persécutions menées des années durant par le FBI à l’encontre de la star, officiellement pour sa consommation de drogues, officieusement pour limiter son influence grandissante et notamment celle de la célèbre chanson «Strange Fruit», qui évoque les lynchages d’Afro-Américains commis impunément.

On suit donc Billie Holiday dans ses déboires avec l’Etat, les substances et les hommes, au moment où Jimmy Fletcher, agent chargé de l’espionner, s’immisce dans son petit cercle déjanté pour la dénoncer… avant de tomber amoureux, sans retour. Grande histoire et récit personnel s’entremêlent donc; c’est en tout cas ce que tente le film. Car très vite, les éléments censés évoquer le contexte social et politique de cette période semblent plaqués à une intrigue ayant pris une autre direction. Les personnalités convoquées - du teigneux Harry Anslinger, qui veut coincer la fauteuse de trouble Tallulah Bankhead, actrice hollywoodienne et amante de Billie - servent de prétexte pour dénoncer des thématiques certes brûlantes encore d’actualité (homosexualité stigmatisée, violence raciale) mais auxquelles le film accorde très peu de place. Le recours ponctuel à une esthétique d’images d’archives (passage au noir et blanc, raies de la pellicule) est appliqué sans logique apparente, renforçant le côté artificiel du procédé.

L’engagement militant de cette figure iconique de la musique, son inscription dans une histoire plus large des Etats-Unis - que laissait d’ailleurs supposer le titre - s’estompent donc au profit de Billie «la femme blessée». La volonté de montrer la vulnérabilité et l’humanité des artistes, derrière le génie et les apparences, est un passage obligé des biopics et beaucoup repose dès lors sur les épaules de l’interprète, qui doit pouvoir redonner vie à une image figée dans le temps, tout en en incarnant les facettes les plus secrètes. De ce point de vue, Andra Day est une claque; un visage, une voix (chanteuse de métier, elle interprète elle-même les chansons du film), une présence foudroyante qui attire tout le reste dans son sillage. Les interviews menées par l’actrice mettent l’accent, comme souvent, sur sa transformation stupéfiante qui en fait la copie conforme ou presque de Billie Holiday. Mais plus que cela, plus que les nombreux plans qui recréent photographies ou instants célèbres de la carrière de cette dernière, elle explose dans les scènes quotidiennes, inventées ou non, et impose un corps, des attitudes, un mouvement de vie qui dépassent de loin l’imitation. Une nouvelle «Lady Day» est née!

Adèle Morerod

Appréciations

Nom Notes
Adèle Morerod 13