A Nuvem Rosa

Affiche A Nuvem Rosa
Réalisé par Iuli Gerbase
Titre original A Nuvem Rosa
Pays de production Brésil
Année 2021
Durée
Genre Drame
Distributeur trigon-film
Acteurs Renata de Lélis, Eduardo Mendonça, Kaya Rodrigues, Helena Becker, Girley Paes
Age légal 14 ans
Age suggéré 14 ans
N° cinéfeuilles 856

Critique

Iuli Gerbase parle de la vie sous un nuage toxique. Ironie, elle a écrit son scénario en 2017, ignorant ce que l’humanité allait vivre sous l’emprise du coronavirus. Les similitudes avec la situation actuelle sont piquantes, mais ce n’est pas le propos du film.

Les premiers plans montrent une ville encore endormie, ses bâtiments serrés les uns contre les autres, poétiquement éclairés par le bleu de l’aurore. Tout aussi poétique est cette brume rose qui glisse lentement dans le ciel. Au bord de l’eau, un promeneur regarde l’étrange paysage et s’affaisse subitement; son chien hurle à la mort.

La veille, Giovana (Renata de Lélis) a rencontré Yago (Eduardo Mendonça) dans une soirée; ils ont sympathisé et sont rentrés ensemble. Ils dorment encore lorsque sonne l’alarme générale, aussitôt suivie d’une voix de haut-parleur qui annonce l’arrivée d’un nuage hautement toxique. Il faut d’extrême urgence se mettre à l’intérieur et boucler toutes les fenêtres. L’enfermement est total; le besoin de nourriture et d’autres articles courants est rapidement résolu par le gouvernement qui installe un système de tubes et de sas à fixer contre une vitre.

Le socle du film est la science-fiction. «Ce n’est pas un scénario qui se soucie d’explorer les aspects logiques de la situation, confirme la réalisatrice. Une fois que le nuage toxique est là, que le confinement est fixé, l’accent est mis sur les personnages. Je voulais explorer la relation entre eux deux dont les visions sur la liberté et le bonheur sont très différentes. Je voulais aussi explorer la relation qu’ils ont avec le nuage qui les encercle.»

En 2018 est sorti Dans la brume de Daniel Roby, avec Romain Duris. Le danger y était fortement visible, la tension débordait de partout, le film voulait effrayer. Ce n’est pas le cas de The Pink Cloud, œuvre psychologique où la menace prend la forme d’un nuage séduisant, léger, comme un cirrus de printemps. Il colore tout l’appartement où sont réfugiés Giovana et Yago, ces deux êtres dont la réalisatrice observe la résistance à la proximité et à l’usure du temps. Ici le couple s’est formé sans songer à autre chose que passer un bon moment ensemble. Pourtant, s’il faut continuer, comment tenir le coup en tête à tête perpétuel, entre quatre murs immuables, sans autres contacts que ceux qu’on établit par internet?

The Pink Cloud est le premier long métrage de Iuli Gerbase, née en 1990. L’analyse de cette relation est le fait d’une grande maturité. Les personnages sont bien écrits et les rôles vécus avec naturel; leur subtilité alliée à un dialogue sobre suggèrent mieux la difficulté de la cohabitation et l’emprise de l’angoisse que ne le feraient des crises continuelles. Des crises, il y en a, forcément. Elles s’expriment beaucoup par la mise en scène, comme l’obscurité fréquente, le refuge dans les divers appareils électroniques, la répartition des locaux.

Le défi du huis clos est relevé. Giovana et Yago sont pris par le nuage à un moment de leur vie. Cette vie va se poursuivre, mais comme ils ne l’ont jamais imaginée; cela les oblige à revoir leurs habitudes. Ils vont évoluer, user chacun de leur faculté d’adaptation. La première s’interroge sur sa place de femme, le second tente de garder le contact avec un père dépendant. Ils ont de l’argent et une existence confortable. On perçoit que ce n’est pas le cas pour tout le monde, que d’autres enfermements connaissent des issues tragiques. Ces scènes ouvrent de nouveaux champs de réflexion dans un film qui en est très riche.

A commencer, peut-être, par les analogies possibles avec la pandémie de Covid-19, bien que le film ait été conçu et réalisé avant la crise actuelle. «J’aime à penser que tout comme chacun d’entre nous a vécu sa propre expérience de la vie en confinement, nous aurons tous notre propre perception intime de mon film.» Justement, à travers le couple The Pink Cloud parle aussi de responsabilité, de choix, de désirs, d’égoïsme, de liberté, tant de sentiments parfois contradictoires sur lesquels les enfermés du coronavirus sont amenés à méditer profondément.

Geneviève Praplan

Appréciations

Nom Notes
Geneviève Praplan 12