Pur-sang

Affiche Pur-sang
Réalisé par Cory Finley
Titre original Thoroughbreds
Pays de production U.S.A.
Année 2017
Durée
Musique Erik Friedlander
Genre Thriller, Drame, Comédie, Policier
Distributeur Netflix
Acteurs Anton Yelchin, Olivia Cooke, Anya Taylor-Joy, Paul Sparks, Kaili Vernoff, Francie Swift
Age légal 13 ans
Age suggéré 13 ans
N° cinéfeuilles 850

Critique

Une amitié ambiguë à la base d’un projet meurtrier illustré par des plans d’un esthétisme ravageur: voilà ce que nous offre ce film, porté par un duo principal de choc et de charme.

Deux amies d’enfance, Lily (Anya Taylor-Joy) et Amanda (Olivia Cooke), se retrouvent après une longue séparation afin que la première aide la seconde à réviser pour ses examens. Toutes deux sont dans une situation délicate et isolées, ce qui facilite le renouement de leurs liens d’antan, alors même que les deux jeunes filles semblent devenues très différentes, Amanda étant une paria ne ressentant jamais rien tandis que Lily est très émotive et appartient à la haute société. Mais leur amitié retrouvée va-t-elle résister à la proposition d’Amanda de faire appel à un bandit du coin, Tim (Anton Yelchin), pour tuer le beau-père de Lily, Mark, que celle-ci déteste?

Le film se déroule en majeure partie dans le superbe manoir de la famille de Lily, demeure que cette dernière peine cependant à habiter, tant dans l’espace (ils ne sont que trois pour une très grande surface, et les pièces paraissent vides en permanence) que dans la création d’un véritable foyer, car leurs relations sont dépourvues d’amour. La superficialité est donc la reine de ce château (en témoigne l’échange entre l’adolescente et sa mère, allongée dans un solarium car Mark «l’aime quand elle a un peu de couleurs»). Qu’on se rassure, la réalisation de Cory Finley est loin de suivre le même schéma et de n’être qu’une coquille vide, une enveloppe dorée, et se montre aussi convaincante sur le fond, dérangeant et émouvant, que sur la forme, au style magnifique. Dans son décor de banlieue chic, l’œuvre peint le portrait d’une jeunesse quelque peu désabusée, qui rêve de succès et de richesse (Amanda semble obsédée par Steve Jobs et la dimension de «self-made-man» qu’elle lui rattache, Tim, inspiré par le grand nombre de millionnaires de moins de 30 ans aux États-Unis, veut en faire partie) mais qui ne fait pourtant rien pour atteindre ces objectifs et se complaît dans la violence tout en la condamnant (les amis de Lily critiquent Amanda pour ce qu’elle a fait à son cheval, mais cela ne les empêche pas de s’envoyer des photos dudit acte, entre fascination et répugnance). Dans un tel contexte, les aventures de nos deux héroïnes ne peuvent que mal tourner.

La réussite de cette histoire, qui captive le spectateur par un suspense toujours présent mais subtil et par une étude de personnages dérangés mais bizarrement attachants, est principalement due aux interprétations de son talentueux duo d’actrices principales, Anya Taylor-Joy, qui n’avait pas encore connu sa grande percée grâce au Jeu de la dame, et Olivia Cooke, qu’on aimerait voir plus souvent. Saluons également celle du regretté Anton Yelchin, qui signe ici un de ses derniers rôles. Certaines critiques ont fait un rapprochement entre les deux personnages féminins et les notions du «ça» et du «surmoi» développées par Freud. En effet, Amanda, de par son incapacité à ressentir la moindre émotion, peut ainsi laisser libre cours à toutes ses paroles et actions. Elle représenterait donc le «ça». De son côté, Lily ressent tout de manière exacerbée, mais se forge une image lisse de politesse à toute épreuve, et serait donc le «surmoi». C’est une théorie intéressante, mais qui se craquelle au fur et à mesure de l’avancée du film. Car si les rôles semblent bien définis et opposés à son début, ils finissent par se troubler et même s’inverser. Par la renaissance de cette amitié ambiguë, qu’on pourrait assimiler à de l’amour refoulé dans certaines scènes, Amanda tend une sorte de miroir déformant à Lily qui, quant à elle, la pousse à sortir de sa carapace. On vient même à se demander au final qui est la plus sociopathe et la moins empathique des deux. Le dernier acte est tout bonnement déchirant et on ne sort pas du visionnage intact. On se surprendra même à y penser encore quelques jours plus tard. Entre nihilisme, trame neo-noir, esthétisme léché et personnages troublants, il est difficile de, à l’instar d’Amanda, ne rien ressentir face à cette petite merveille.

Amandine Gachnang

Appréciations

Nom Notes
Amandine Gachnang 18