Poly

D’une bienveillance assumée, ce film pour enfants construit, à grands renforts de couleurs appuyées, un monde enchanté où s’observe le désenchantement des figures masculines.

Edulcorer, habituellement, c’est aplatir, lisser, polir. Et bien souvent, infuser son long métrage de joliesse artificielle sert à masquer un manque de fond sidérant. Sauf que Nicolas Vanier, lui, justifie sa photographie étincelante par le monde qu’il dépeint: celui de l’enfance, celui qui autorise une jeune fille à décider, seule, de libérer un poney de cirque maltraité. Mais en réalité, cette histoire de libération n’est, pour le cinéaste, qu’un prétexte, un leurre pour continuer l’exploration de la relation qui lie l’homme à l’animal (Le Dernier trappeur, Loup, Belle et Sébastien, ou encore l’année dernière, Donne-moi des ailes). En d’autres termes, dans Poly, c’est à hauteur d’enfant que nous est adressé le message d’adulte: que reste-t-il de notre rapport au vivant?

Le discours pro-animal, bien qu’il ne soit pas le seul porté par le film (émancipation de la femme, mise à mal de l’institution policière, ségrégation géographique), traverse le long métrage par contrepoint. C’est-à-dire que sa force s’inscrit moins dans sa représentation directe que dans l’incarnation des comportements qu’il tend à abolir: maltraitance animale exercée par un avide propriétaire de cirque, ou encore père boucher réprimandant son fils qui ne souhaite plus manger de viande. Bien entendu, ce sont là des motifs convenus, mais ils ont au moins le mérite d’incorporer un film qui assume tant son étiquette que sa fonction. Etiquette: film familial, film qui s’adresse aux familles en général, aux enfants en particulier, et qui se doit, par conséquent, d’être compréhensible par tout le monde. Fonction: sensibiliser le (jeune) spectatorat à des enjeux contemporains, et lui dévoiler - explicitement et grossièrement, certes - l’envers d’un spectacle, le cirque, qui, par métonymie, se donne comme l’étendard de tous les autres. A savoir, un lieu du regard abusé, de la fascination aveugle, de la fausse conscience.

De par sa générosité, la sincérité du geste qui l’habite et la vitalité de son propos, Poly montre comment il est possible de vulgariser pour mieux se faire entendre. Car son désir d’interroger notre rapport au vivant trouve dans le cirque une piste de réflexion pertinente.