Ema y Gastón

Affiche Ema y Gastón
Réalisé par Pablo Larrain
Titre original Ema y Gastón
Pays de production CHILI
Année 2019
Durée
Musique Nicolas Jaar
Genre Comédie dramatique
Distributeur Trigon
Acteurs Gael García Bernal, Mariana Loyola, Mariana Di Girolamo
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 838

Critique

Pablo Larraín, talentueux cinéaste chilien, a su en quelques années imposer une signature forte à travers des films qui explorent en priorité les possibilités d’une expression visuelle et filmique originale.

Voici donc le cinéaste de retour dans son pays natal, après Jackie (2016, CF n. 761), pour raconter une histoire qui se veut assez intime et qui ne concerne pas directement, à première vue, l’histoire politique et sociale du Chili. Autour d’Ema, danseuse et chorégraphe incarnée par Mariana Di Girolamo, on découvre les affres d’une relation de couple détruit, l’image d’un échec qui est le signe extérieur d’un grand et profond mal-être de part et d’autre.

     Le comportement d’Ema est aussi atypique que celui de Gastón, même si celui-ci n’est pas le personnage principal. C’est donc le personnage féminin qui constitue le fil conducteur d’un film qui maintient en alerte permanente le questionnement du spectateur. Le récit multiplie les descriptions de manipulations entre les personnages: les dialogues sont souvent insidieux, peu compréhensibles à première vue, et c’est peut-être là une des caractéristiques de ce long métrage. L’intrigue d’Ema y Gastón repose essentiellement sur l’identité pour le moins trouble et insaisissable du personnage principal et l’on a l’impression que son entourage n’est là que pour lui offrir un (ou des) répondant(s) dans une mise en miroir glaciale, dans des gestes corporels étranges (mais maîtrisés), à travers la chorégraphie et les danses de rue (le reggaeton), alors que l’avenir même d’Ema semble dans l’immédiat buter sur un horizon bouché.

     S’appuyant sur une complicité de travail étroite avec son chef opérateur Sergio Armstrong, Pablo Larraín offre un produit filmique qui privilégie écriture et esthétisme. Il est difficile au premier abord de savoir par quel bout l’appréhender et en saisir le (ou un?) message. Le cinéaste veut-il parler de l’adoption (Ema et Gastón ont élevé un garçon colombien, Polo, qu’ils ont renvoyé par la suite au Service de l’enfance au vu de ses frasques)? On apprend que le sujet de l’adoption au Chili est d’actualité et suffisamment polémique, lié à de nombreux scandales. Cela n’empêche pas le cinéaste de se permettre une grande liberté de ton et de développer un film avant tout intimiste et qui pourra surprendre. Les personnages peuvent paraître souvent instables, velléitaires et uniquement mus par leurs propres intérêts et leurs amours (au sens vraiment très large du terme): les relations entre les sexes ne connaissent pas de limites, et le film ne nous fait grâce d’aucune coucherie.

     L’option est peut-être d’explorer une forme plus intime, plus érotique du cinéma, où les personnages semblent se confondre parfois avec des marionnettes confiées aux mains d’un cinéaste omnipotent qui ne veut rien cacher. Mais une telle orientation ne va pas sans plusieurs séquences fastidieuses et quelques excès inutiles. La musique est souvent pesante et de longs monologues prennent trop de place. Et finalement le résultat est mitigé: le tableau de cette mini-société est assez décevant, tous les protagonistes étant en train d’errer à la recherche d’un sens à donner à leur existence.

Antoine Rochat

Appréciations

Nom Notes
Antoine Rochat 11
Camille Mottier 8