Cam

Affiche Cam
Réalisé par Daniel Goldhaber
Titre original Cam
Pays de production U.S.A.
Année 2018
Durée
Musique Gavin Brivik
Genre Thriller, Epouvante-horreur
Distributeur Netflix
Acteurs Melora Walters, Devin Druid, Madeline Brewer, Patch Darragh, Imani Hakim, Jessica Parker Kennedy
Age légal 16 ans
N° cinéfeuilles 834
Bande annonce (Allociné)

Critique

Avec son intrigue à la Black Mirror, Cam aborde les dangers de la technologie et d’internet, par le biais plutôt original du monde des camgirls. Une façon de mettre en garde le spectateur contre le caractère pernicieux qu’il peut y avoir à dédoubler son identité via le virtuel.

Alice, alias Lola, est une camgirl: elle propose des spectacles dénudés par webcam à des fans qui lui versent de l’argent pour la voir faire ce qu’ils désirent. Le vœu le plus cher de la jeune femme est d’intégrer le top 50 des «girls» accumulant le plus de vues et de devenir numéro 1. Alors que son succès augmente, elle se retrouve un beau jour exclue de son compte et voit avec horreur une autre fille, lui ressemblant trait pour trait, la remplacer et l’évincer…

Grâce à une intrigue condensée et une actrice principale très convaincante, le film nous agrippe par son suspense bien construit, même si la résolution quelque peu énigmatique et frustrante du mystère - l’histoire hésitant presque continuellement entre le paranormal et le rationnel - aura tendance à laisser le spectateur sur sa faim. Cam nous aspire dans un univers plutôt méconnu car peu représenté. Ceux qui pourraient trouver le postulat de départ exagéré seront surpris d’apprendre que l’histoire est inspirée d’une véritable expérience, celle d’Isa Mazzei, ici scénariste, qui a elle-même travaillé dans ce milieu. Elle dresse le portrait d’une communauté sans pitié (les camgirls n’hésitant pas se rabaisser entre elles pour leur profit personnel), dont tous les membres considèrent les autres comme des objets (du désir ou pécuniers) leur permettant d’assouvir leurs besoins. La perception des autres et de soi-même, voilà le cœur du film, qui nous montre à quel point celle-ci peut être perverse. Cam tient en effet un discours sur le dédoublement de personnalité que peut entraîner l’entretien d’un profil en ligne, et plus précisément sur les réseaux sociaux.

Lorsqu’Alice essaie de comprendre ce qui se passe, ceux à qui elle demande de l’aide sont plus prompts à la juger qu’à la comprendre, la palme revenant aux forces de police. Les agents, mais également sa mère, projettent sur elle les fantasmes liés à son métier de camgirl (pratiques sexuelles déviantes que les premiers désirent connaître, jeunesse et séduction que la deuxième a perdues mais qu’elle admire chez sa fille) et ne l’écoutent pas vraiment. Ces deux réactions vont à l’encontre de ce qu’imaginait la jeune femme: des policiers, elle attendait une réaction de pitié de par son statut de victime et de sa mère, de la honte. Cette confrontation d’imaginaires (celui qu’on pense que les autres vont avoir de nous et celui qu’ils ont vraiment) renvoie à la confrontation qui peut se créer entre deux «personnalités»: la virtuelle (celle d’internet, des réseaux sociaux) et celle de la réalité. Alice pensait contrôler sa personnalité en ligne, Lola, et pourtant ce n’est pas le cas; de la même manière, elle perd peu à peu la maîtrise de la vie réelle. Ce qui pourrait nous faire douter: Alice est-elle folle?

Le problème vient plutôt du fait que la jeune femme est tellement prête à tout pour accéder à une place en haut du classement (ce qui est imagé par le fait que seul son ascension réussit à la faire jouir) qu’elle se perd en route, et devient une autre, dans le sens littéral du terme, lorsque les choses vont trop loin et qu’elle met en danger sa santé. Les références à Alice au pays des merveilles présentes dans les noms que choisit l’héroïne sur le chat (Mad Hatter, MrTeapot) et son vrai prénom reflètent l’idée qu’elle serait tombée dans un trou de lapin pour arriver dans une réalité alternative, où ses actions deviendraient, pour citer Lewis Carroll, de plus en plus curieuses. Par ailleurs, quand Alice explique à sa mère que c’est une autre personne et non elle que l’on voit sur les vidéos, celle-ci en conclut immédiatement que sa fille ne parle pas d’un véritable double mais fait une distinction entre son moi virtuel et le réel. Le film est donc une métaphore sur notre approche des réseaux sociaux, sur le fait qu’on expose souvent deux versions de nous-mêmes, et sur la peur que cette version fabriquée, qui n’est pas tout à fait nous-mêmes, soit celle que les autres préfèrent. Un film à montrer aux influenceurs, qui en ont fait leur métier?

Amandine Gachnang

Appréciations

Nom Notes
Amandine Gachnang 15