Sous la peau

Affiche Sous la peau
Réalisé par Robin Harsch
Pays de production Suisse
Année 2019
Durée
Genre Documentaire
Distributeur Aardvark Film Emporium
Age légal 10 ans
Age suggéré 12 ans
N° cinéfeuilles 830

Critique

Plongée au cœur de situations méconnues et souvent incomprises, ce documentaire sur quelques trans est nécessaire et utile pour mieux (ré)apprendre qu’il est long le chemin pour pouvoir intégralement dire «je».

Devenir soi. Ce droit a l’air évident et il ne l’est pourtant pas, comme l’attestent les témoignages d’individus désireux de changer de sexe ou en passe de vivre cette transformation radicale (plus de soixante interventions chirurgicales en 2016). C’est en suivant pendant deux ans à Genève trois jeunes trans - terme utilisé par les personnes qui refusent d’utiliser le terme transsexuel estimant que l’identité sexuelle n’a rien à voir avec la sexualité - que Robin Harsch permet à chacun d’approcher une question souvent taboue. Aussi ce film parle-t-il avant tout de la rencontre du réalisateur avec Logan, Söan et Mixair, dont les propos authentiques et courageux écartent bien des fausses représentations et interprétations qui ont longtemps menacé ou menacent encore l’existence des trans. L’attention et l’écoute de ces jeunes - que leur mal-être a parfois poussé au suicide - sont donc primordiales avant toute interprétation et tout jugement.

L’interlocuteur ne peut en aucun cas prétendre mieux savoir que l’autre ce qu’il vit, comment il éprouve sa différence, quelle est sa souffrance et sa difficulté à s’accepter alors que son corps ne lui paraît pas correspondre à ce qu’il est au plus profond. «C’est intéressant, confie par exemple Effie Alexandra, parce que je ne me suis jamais sentie comme un garçon. J’étais une fille avec des organes génitaux différents. Je dirais même que j’avais un pénis de fille. Parfois je me disais que j’allais me réveiller un jour et qu’il ne serait pas là.» Et aujourd’hui, après opération, la jeune femme conclut: «Je me sens moi, je me sens libre. Je ne peux même pas t’expliquer la différence que ça fait dans ma tête. C’est une façon de m’approprier… Je sens que mon corps m’appartient.»

Il y a le parcours de chaque jeune (adulte), l’image de soi qui se transforme, et il y aussi l’entourage et ses regards, ses incompréhensions et son questionnement. Il est à cet égard remarquable d’entendre telle mère et tel père, pour lesquels, dans un premier temps, il fallait presque faire le deuil de leur enfant. «C’est comme si ce garçon allait tuer ma fille que j’ai connue pendant dix-huit ans. Et que je n’allais plus la revoir», avoue une mère.

Dans son entier, ce documentaire a bénéficié de l’appui et de l’expérience du Refuge (service de l’Association Dialogai) qui, en ville de Genève, est un lieu ouvert permettant aux personnes concernées (et à leur entourage et aux professionnels de l’encadrement) de s’informer et surtout d’être reçues et acceptées, leur offrant un véritable tremplin vers l’autonomie et l’affirmation de soi. Si Sous la peau génère quelque inconfort et s’il dérange, à n’en pas douter, il aura atteint son but: questionner vraiment pour ne pas en rester aux clichés et aux rejets dont sont victimes celles et ceux qui aimeraient accéder à leur propre identité.

Serge Molla

Appréciations

Nom Notes
Serge Molla 14