A Tale of Three Sisters

Affiche A Tale of Three Sisters
Réalisé par Emin Alper
Pays de production Turquie
Année 2019
Durée
Musique Giorgos Papaioannou, Nikos Papaioannou
Genre Drame
Distributeur trigon-film
Acteurs Cemre Ebüzziya, Ece Yüksel, Helin Kandemir, Kayhan Açikgöz, Müfit Kayacan
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 827

Critique

Drame turc et cousin des Trois sœurs de Tchekhov, A Tale Of Three Sisters nous installe au cœur d’un foyer nimbé d’espérance, mais perclus de réalité sociale. Un film dense, à la mise en scène impeccable.

Trois jeunes filles (Reyhan, 20 ans; Nurhan, 16 ans; et Havva, 13 ans), trois sœurs qui toutes ont une même aspiration: quitter leur village montagnard et pauvre d’Anatolie centrale, déjouer le déterminisme campagnard qui devrait les garder rivées à la ferme familiale. Elles veulent la plaine, la ville, les opportunités de la ville. Et leur père caresse pour elles ce même espoir. C’est qu’une coutume turque favorise pareils surclassements par le biais d’adoptions symboliques: reçoit le statut de «besleme» (fille placée) celle qui est prise sous l’aile d’une famille plus aisée en s’occupant des vrais enfants de celle-ci. On est alors plus que servante, puisqu’on évolue dans l’intimité du nouveau nid; mais on ne devient jamais tout à fait «l’enfant de»: la chose est évidente surtout lorsque la greffe ne prend pas.

C’est le cas de nos trois sœurs, temporairement peut-être, et pour des raisons différentes. L’ainée (Cemre Ebüzziya), tombée enceinte, s’en est revenue, et a épousé l’idiot du village (dont la franchise, cette grossièreté, se fera moteur du drame). Et puis la cadette (Helin Kandemir), suite à la mort du fils de sa famille adoptive. Enfin la deuxième (Ece Yüksel), parce que trop conflictuelle (elle a frappé l’enfant de ses parents adoptifs). Voilà donc reformée la famille autour du vrai père - le biologique -, qui radote, et autour de l’âtre, où brûle un feu qui souvent durant le film fera l’objet de plans contemplatifs.
Symbole pluriel, il ramasse, ce feu, l’entier de l’œuvre. Il est celui du désir charnel (interrogé ou vécu par les deux sœurs plus âgées); celui du temps qui patiemment, inexorablement se consume, comme la jeunesse; celui de la violence lorsque l’empêchement conjugué à la promiscuité vient allumer les âmes. Mais il est aussi, matériellement, ce qui projette dans la demeure de l’or et de l’ombre, un clair-obscur de conte, sublime, qui enveloppera si bien les récits des personnages. Dans cette maison d’Anatolie, la parole se fait tchekhovienne: elle dit l’espérance et l’enlisement, avec autant de cruauté que d’humour.

Alexandre Vouilloz

Appréciations

Nom Notes
Alexandre Vouilloz 19
Anthony Bekirov 16