Réalisé par | Boris Lojkine |
Titre original | Camille |
Pays de production | France, Centrafrique |
Année | 2019 |
Durée | |
Musique | Eric Bentz |
Genre | Drame |
Distributeur | trigon-film |
Acteurs | Grégoire Colin, Bruno Todeschini, Nina Meurisse, Augustin Legrand, Fiacre Bindala, Michael Zumstein |
Age légal | 16 ans |
Age suggéré | 16 ans |
N° cinéfeuilles | 823 |
Avec Camille, Boris Lojkine a réalisé en République centrafricaine - à partir de faits réels - un film de fiction qui retrace les derniers mois d’une jeune journaliste et photographe française, Camille Lepage (Nina Meurisse), partie couvrir la guerre civile qui avait repris dans ce pays en 2012. Elle sera tuée dans une embuscade, en mai 2014, à l’âge de 26 ans.
Après avoir travaillé au Soudan du Sud, Camille Lepage avait gagné la capitale Bangui en septembre 2013 et y avait noué des liens avec des étudiants de son âge. Les violences et les massacres de cette guerre opposant rebelles Séléka musulmans (du Nord) et milices chrétiennes anti-balaka (du Sud) amèneront la France à intervenir (l’opération Sangaris de décembre 2013), mais les soldats français quitteront le pays fin 2016 sans avoir pu rétablir la paix.
Le cinéaste Boris Lojkine, après deux films documentaires tournés au Vietnam, s’était plongé avec Hope (2014) dans l’Afrique des migrants en route vers l’Europe, filmant des acteurs amateurs sur leur route d’exil. Avec Camille, il ne s’agit pas à proprement parler d’un biopic mais plutôt de l’histoire d’une jeune femme qui va jusqu’à mettre sa vie en jeu pour attirer l’attention sur des populations oubliées. Comme pour chercher et donner un sens à cette crise et à ses violences extrêmes.
Le cinéaste dit que son film est un récit - concentré et tendu - d’initiation, un portrait de femme puissante, déterminée et profonde. Il parle aussi des difficultés du métier de photographe et de correspondante de guerre, sans compter les problèmes causés par les origines de la jeune femme : Camille est européenne, blanche, elle travaille seule, en pleine violence.
A côté de la protagoniste principale, Boris Lojkine a placé trois personnages d’étudiants (inspirés d’existences réelles): Cyril (Fiacre Bindala), jeune étudiant rappeur qui deviendra anti-balaka, Leila (Ousnabee Zounoua), fille d’un musulman et d’une chrétienne, victime elle aussi de miliciens Séléka, et Abdou (Abdouraouf Diallo), un jeune musulman contraint de s’exiler. On pourrait aussi signaler la participation - il joue son propre rôle dans le film - du photographe suisse Michael Zumstein, qui a bien connu Camille Lepage. L’interprétation de Nina Meurisse (Camille) est remarquable: «Nina porte en elle ce mélange de naïveté et de détermination qui est pour moi la définition du personnage central, dit le cinéaste. Nina a beaucoup lu sur Camille, elle s’est mise à la photo. (…) Le tournage a été dur pour elle, mais cette dureté me semblait être la clé de la crédibilité du personnage.»
Une autre qualité du film tient au fait qu’il a été tourné en République centrafricaine, alors que le pays est encore en guerre aujourd’hui. Les décors sont dès lors authentiques et n’auraient pas pu être reconstitués ailleurs. Plusieurs photos prises par Camille Lepage occupent une place importante dans le film, forçant le spectateur à se concentrer sur des scènes qu’elle avait elle-même saisies sur le vif. Film et photos se complètent ainsi, donnant naissance à des impressions différentes: images de fiction, images d’archives filmées par la télévision au moment des événements, images saisies par Camille Lepage, tous ces documents nous rappellent que ce n’est pas du «cinéma», mais bien la réalité d’une guerre.
Boris Lojkine dit s’être entouré d’une équipe de jeunes cinéastes centrafricains qui, par leur complicité, lui ont permis de comprendre et de pénétrer dans le pays: «Les autorités de Centrafrique nous ont aidés sans réserve, dit-il. Nous avons pu faire ce qui semblait impensable: bloquer des carrefours, organiser des manifestations sur la principale artère de Bangui, reconstituer des scènes de violence. (…) La plupart des acteurs et des figurants avaient vécu directement les événements tragiques de 2013. Ils savaient très bien de quoi il était question. (…) J’ai privilégié l’improvisation, j’ai constamment déconstruit le scénario pour rouvrir des espaces de liberté et faire exister tout ce qui ne pouvait pas être écrit.»
Biopic sur un sujet sensible et très personnel, Camille est un film très maîtrisé, d’une écriture sobre, proche du documentaire. Une œuvre forte, qui sort de l’ordinaire, qui touche et qui frappe les esprits. Il a reçu le Prix du Public lors du dernier Festival de Locarno.
Antoine Rochat
Nom | Notes |
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Antoine Rochat | 17 |