Coeurs cicatrisés

Affiche Coeurs cicatrisés
Réalisé par Radu Jude
Titre original Inimi Cicatrizate
Pays de production Roumanie, Allemagne
Année 2016
Durée
Genre Drame, Biopic
Distributeur Bellevaux
Acteurs Gabriel Spahiu, Serban Pavlu, Alexandru Dabija, Ivana Mladenovic, Sofia Nicolaescu, Dana Voicu
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 821

Critique

On est en Roumanie, peu avant la Deuxième Guerre mondiale (1937), dans un sanatorium des bords de la mer Noire, aux côtés d’Emanuel, un jeune homme de 21 ans atteint de tuberculose osseuse vertébrale. Entouré d’autres patients qui souffrent du même mal il raconte ses efforts et ceux de ses compagnons pour ne pas sombrer dans la dépression.
Le réalisateur Radu Jude a mis en images le roman autobiographique de Max Blecher, un écrivain et poète roumain qui décéda de la même maladie à l’âge de 29 ans. Avec un cadre cinématographique fixe et une caméra le plus souvent immobile le cinéaste aborde le difficile sujet de la fin d'une vie et de son accompagnement.
Tout au long de Cœurs cicatrisés le jeune homme est couché sur son lit, dos et thorax plâtrés, mais son esprit reste en alerte. Protagoniste principal d’un récit inattendu, souvent triste, parfois pince-sans-rire, Emanuel (Lucian Teodor Rus) porte un regard critique et désabusé sur le monde qui l’entoure. Et sur son existence personnelle.
Le film peut se lire sur trois niveaux. Celui de l’auteur du roman autobiographique d’abord, Max Blecher, puisque les extraits de son livre sous-tendent toute l’œuvre filmée, rappelant la fragilité de l’être humain, sa solitude et la petite place qu’il occupe dans l’histoire du monde. Celui d’Emanuel ensuite, optimiste par moments, qui lutte pour sa survie et refuse de baisser les bras, un personnage attachant qui stimule souvent son environnement. Un troisième niveau enfin, celui du contexte social entourant les patients et qui s’exprime à travers leurs conversations, des articles de journaux ou des émissions de radio: la guerre est proche, c’est la montée en puissance d’Hitler, la naissance des mouvements fascistes et antisémites. Emanuel a des origines juives et subit les moqueries de ses camarades de chambre. Tout cela dans le cadre d’un hôpital qui, au-delà de sa mission de guérir les corps, s’efforce de jouer un rôle de négociateur, de retrouver une forme de paix et de rétablir les liens brisés entre les citoyens.
On pourrait aussi parler d’autres protagonistes que l’on croise au chevet d’Emanuel, en particulier de son amie Solange (Ivana Mladenovic), une ancienne patiente du sanatorium qui a eu la chance de guérir, de retrouver une mobilité complète et qui défendra son ami. Une femme intelligente et dynamique en même temps qu’un symbole d’espoir. On citera encore les parents du patient ou le médecin de l’établissement (Serban Pavlu) chargé de le soigner.
Film très classique dans sa forme et sur le plan technique, Cœurs cicatrisés place le spectateur aux côtés des patients: une position de témoin immobile, contraint de s’intégrer dans un monde médical clos. Toutes les séquences sont interrompues par des extraits tirés du livre de Max Blecher qui s’inscrivent sur l’écran (sur fond noir), en contre-point ou en résonance de ce que l’on vient de voir ou d’entendre. Le procédé est original sans doute, mais il a le défaut de provoquer des coupures, sinon de multiples ruptures dans le déroulement d’un récit qui se développe dès lors très lentement. De ce fait le film est long (2 h 21), et le spectateur connaît très tôt l’épilogue tragique de cette triste destinée. Un film verbeux, parfois éprouvant, constitué de multiples réflexions sur le sens de la vie et sur l’existence problématique d’un au-delà.

Antoine Rochat

Appréciations

Nom Notes
Antoine Rochat 11