Once Upon a Time… in Hollywood

Affiche Once Upon a Time… in Hollywood
Réalisé par Quentin Tarantino
Titre original Once Upon A Time...in Hollywood
Pays de production U.S.A.
Année 2019
Durée
Genre Drame, Comédie
Distributeur Sony
Acteurs Brad Pitt, Leonardo DiCaprio, Timothy Olyphant, Emile Hirsch, Margot Robbie, Margaret Qualley
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 817
Bande annonce (Allociné)

Critique

On a pu reprocher à Tarantino son goût immodéré, voire irresponsable, pour la violence cinématographique et, depuis Inglourious Bastards, ses libertés radicales prises avec l’histoire. Once Upon A Time… In Hollywood se donne à voir comme la brillante réponse à ces attaques.

On sait que Tarantino a l’œil cinéphile, l’explosif à la main, la bouche qui rigole, cite, raconte avec panache. Et qu’il caste à merveille: pour ce film, il s’est allié notamment le charme nerveux, perçant, de Leonardo DiCaprio, et la puissance sculpturale, taiseuse, un peu traînante, de Brad Pitt. Il était une fois, Hollywood… On s’attend à une fresque pop sur le cinéma; on s’attend de toute façon à du tarantinesque: mise en scène et bande-son mixées pour une imparable dose de «fun». Or, s’il s’agit assurément du neuvième rejeton de Tarantino (on y retrouve les ingrédients fétiches de son cinéma), le rythme du film est plus lent que d’habitude, son propos plus réflexif.

Il y est question du rapport entre cinéma et réalité. Et quelle terre, mieux qu’Hollywood, exhibe leurs entrelacs? Nous sommes en 1969. Rick Dalton (DiCaprio), acteur vedette d’une série western, est miné par l’angoisse du déclassement et cherche à se relancer dans une industrie cinématographique en pleine mutation. Cliff Booth (Pitt) est son ami/employé/doublure cascadeur aux blessures narcissiques nettement moindres, mais qui n’en doit pas moins gagner sa croûte. On suit ces deux personnages sur les tournages et dans leur vie privée, leur «réalité». Ce dernier terme doit être invalidé en même temps que prononcé, car Tarantino orchestre la confusion entre ces deux matériaux (niveau réel et niveau cinématographique) avec une maîtrise jouissive et qui ne manque pas de nous déboussoler: musique qui passe d’un niveau à l’autre, extraits de films «fictifs», scènes de films «réels» rejouées (une scène de La Grande Evasion avec le personnage interprété par DiCaprio à la place de McQueen), tournages sans caméras ni équipe technique visibles, nombreuses séquences de «vie réelle» qui empruntent aux codes du western, mélange de personnages «fictifs», par exemple nos deux héros, et «réels», notamment Polanski, Steve McQueen, Bruce Lee, Charles Manson….

Et Sharon Tate.

Elle habite à Cielo Drive, Los Angeles, à côté de chez Rick Dalton. Sharon est au cœur de cette pellicule à l’étoffe composite: lors d’une scène mémorable, on voit l’actrice qui interprète ce personnage (Margot Robbie) entrer dans un cinéma pour se voir (la véritable Sharon Tate) jouer dans The Wrecking Crew. Sa joie est immense.

Mais on connaît l’histoire: le 9 août 1969, la jeune femme, mariée à Polanski et enceinte de lui, est sauvagement assassinée dans leur résidence par des membres de la Manson Family. On connaît l’histoire, mais peut-on la rejouer? Voilà la question qui constitue le centre de gravité du film, car si celui-ci indique combien cinéma et réalité sont l’un à l’autre perméables, c’est surtout pour interroger le passage de la violence entre ces deux mondes. Le cinéma (hollywoodien) engendre-t-il des tueurs dans le réel? Si c’est le cas, peut-il décemment les ravaler dans de nouvelles et violentes productions? Et les victimes réelles, peut-il les traîner dans son monde de pétards et de grimaces?

Il n’a jamais été question pour Tarantino de refaire l’histoire, sa densité souvent monstrueuse, à coup de plans potaches. Le réalisateur, avec une grande pudeur sous-jacente, semble finalement nous indiquer que le cinéma, si proche se veut-il du réel, doit en rester la maison voisine : espace qui ne rejoue rien, mais déjoue parfois, avec une violence bienvenue.


Alexandre Vouilloz

Appréciations

Nom Notes
Alexandre Vouilloz 18
Serge Molla 12
Noé Maggetti 18
Kevin Pereira 18
Sabrina Schwob 16
Georges Blanc 11