Utoya, 22 Juillet

Affiche Utoya, 22 Juillet
Réalisé par Erik Poppe
Titre original Utøya 22. Juli
Pays de production Norvège
Année 2018
Durée
Genre Drame, Thriller
Distributeur Praesens Film
Acteurs Andrea Berntzen, Sorosh Sadat, Aleksander Holmen, Elli Rhiannon Müller Osbourne, Solveig Koløen Birkeland
Age légal 14 ans
Age suggéré 14 ans
N° cinéfeuilles 798
Bande annonce (Allociné)

Critique

Mention spéciale du Jury œcuménique à la Berlinale

Le pari aussi fou qu’illusoire d’Utøya, 22 juillet est de recréer l’état émotionnel des victimes pendant la tuerie perpétrée sur l’île d’Utøya près d’Oslo en 2011, par un homme d’extrême droite ayant pour cibles de jeunes participants à un camp socialiste.

Le bilan de ce massacre est affligeant: 69 victimes. Pour rendre compte de l’état de détresse des jeunes présents sur l’île, le film est constitué d’un seul plan-séquence - si l’on excepte les images documentaires du début - dans lequel la durée du massacre, 72 minutes, est équivalent à sa durée lors du drame effectif.

 C’est par l’intermédiaire de Kaja (Andrea Berntzen), personnage fictif, que le spectateur sera retenu sur l’île. Rapidement caractérisée comme plus responsable et soucieuse que sa sœur Emilie (Elli Rhiannon Müller Osbourne), sa préoccupation dès le début de la fusillade sera de la retrouver, ce qu’elle ne peut accomplir aisément, devant, après des courses effrénées, se cacher ou marquer des temps de pause. Ainsi, avec une caméra qui imite le regard d’un personnage apeuré et en fuite, en tombant à terre, ou se levant pour guetter l’approche de l’ennemi - comme dans un jeu vidéo - nous suivons, dans un geste répétitif, les rencontres successives de Kaja avec des personnages plus ou moins paniqués, plus ou moins sur le point de mourir. Si ces moments forment des parenthèses durant lesquelles on oublie presque la menace, à la fois omniprésente et diffuse, celle-ci réintervient toujours par le bruit de balles ou la présence d’individus qui courent se cacher.

Le film pose de nombreux problèmes éthiques en postulant qu’il est possible de témoigner de l’expérience des victimes en en faisant une œuvre sensationnelle. De plus, et cela constitue l’un des échecs cuisants de l’œuvre, au lieu d’être tenu en haleine, on s’ennuie devant l’alternance répétée des moments de fuite et des moments d’immobilité où Kaja est en présence de personnes à chaque fois nouvelles.

Enfin, la destinée contraire de Kaja et d’Emilie nous livre un message un peu douteux: pour s’en sortir, il faut ne penser qu’à soi. En somme, s’inspirer des tragiques événements de 2011 en Norvège apparaît ici plus comme un prétexte pour justifier un film qui sans ce label «basé sur des faits réels» ne porterait aucunement l’attention sur lui. C’est pourtant cette revendication qui constitue son défaut majeur. Un paradoxe qui aurait dû conduire son auteur à s’abstenir de porter à terme son projet.


Sabrina Schwob

Appréciations

Nom Notes
Sabrina Schwob 2
Nadia Roch 15