Foxtrot

Affiche Foxtrot
Réalisé par Samuel Maoz
Titre original Foxtrot
Pays de production France, Israël, Allemagne
Année 2017
Durée
Musique Amit Poznansky, Ophir Leibovitch
Genre Drame, Guerre
Distributeur Filmcoopi
Acteurs Lior Ashkenazi, Sarah Adler, Yonaton Shiray, Shira Haas, Karin Ugowski, Yehuda Almagor
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 789
Bande annonce (Allociné)

Critique

Composé de trois parties distinctes, Foxtrot explore le poids de la mort, ou son absence, au sein de la société israélienne.

Nous sommes introduits dans une demeure, et dans le récit, en même temps que des militaires, chargés d'annoncer au couple Feldmann la mort de leur fils Jonathan (Yonaton Shiray), lors d’un accident survenu durant l'exercice de ses fonctions militaires. A partir de ce triste événement qui constitue la toile de fond de cette première partie, tournée presque exclusivement à l'intérieur de l’appartement, Michael, le père, (incarné de manière très touchante par Lior Ashkenazi) sera confronté aux réactions aberrantes que l’annonce du décès suscite autour de lui. D’une part, celle des militaires en présence, qui, de manière envahissante, cherchent à exercer un contrôle sur sa santé mentale et physique ainsi que sur l'organisation de l'enterrement. D'autre part, l'effet de cette nouvelle est aussi représenté quand il s’agit de proches, notamment sur sa mère qui la recevra sans broncher et sans dissimuler un sourire. Ces réponses montrent le refus, aussi bien institutionnel qu'individuel, de faire face à la mort de ce jeune soldat, dans le premier cas en raison de la remise en question du système israélien qu'elle implique, dans le second par la souffrance individuelle qu'elle entraîne. Un effet d'étrangeté est créé, visant à la fois à nous faire éprouver l'état émotionnel de Michael, tout en signalant l'inadéquation entre sa souffrance et l'insensibilité de son environnement. Cela s'exprime très efficacement à partir du montage, de mouvements ostensibles de caméra ou encore par des plans aériens à l'intérieur de l'appartement, donnant la nausée au spectateur en même temps que l'impression d'observer un rat de laboratoire, une victime, en somme, d'une situation dans laquelle elle se retrouve totalement impuissante.
Une rupture radicale amorçant la deuxième partie - tout aussi réussie que la première -, s'établit par un plan sur un checkpoint au milieu de nulle part, où l'unité militaire de Jonathan contrôle chaque passager désirant entrer sur le territoire israélien. De l'obscurité de l'appartement nous passons aux couleurs intenses et multiples du désert. Aucune indication ne nous est donnée sur les rapports temporels entre la première et la deuxième partie; toutefois Jonathan est bien présent. L'indifférence avec laquelle la troupe exerce ses fonctions, la forte présence de la culture américaine, seule source venant combler l'ennui - omniprésent - ainsi que des plans sur des objets visant à créer une distance avec l'action des personnages, participent à rendre compte de l'absurdité de cette situation.
L'originalité de Foxtrot réside dans le recours à l'image, plutôt qu'au discours verbal, pour témoigner des traumatismes et des dérives d'une société. Samuel Maoz n'hésite pas non plus à faire intervenir le destin, ou le hasard, pour venir condamner moralement les actes d'un personnage, comme nous l'indique la dernière séquence du film. Ce que nous apprécions tout particulièrement, c'est sa manière d'inscrire formellement l'incommunicabilité, qui surgit, comme évoqué, entre Michael et son entourage, mais aussi entre les parents et ses enfants. La scission entre la première et la deuxième partie laisse penser qu'il n'y a pas d'échanges entre générations. Michael semble n'avoir foi en rien, comme le suggère son choix d'offrir un magazine de pin-up à son fils lorsque celui-ci part à la guerre, plutôt que la Torah qu'il a lui-même reçue à son âge. De ce fait, il est peut-être responsable de l'absence de réflexion, de l'absence de poids donné aux actions effectuées par Jonathan, commettant accidentellement une bavure qui ne semble pas l'affecter particulièrement.
Ainsi, c'est par un traitement original d'une thématique finalement assez commune que Foxtrot se démarque des autres productions, ce que nous ne pouvons que saluer.

Sabrina Schwob

Appréciations

Nom Notes
Sabrina Schwob 15
Georges Blanc 14