Jusqu’au bout des rêves

Affiche Jusqu’au bout des rêves
Titre original Bis ans Ende des Träume
Année 2018
Durée
Distributeur Frenetic
Age suggéré 12 ans
N° cinéfeuilles 785

Critique

Le Haut-Valaisan Wilfried Meichtry est historien, scénariste et réalisateur indépendant. Il est l'auteur de ce premier et passionnant documentaire-fiction rappelant l’existence mouvementée d’un couple hors du commun, Peter von Roten et Iris Meyer, lui juge et conseiller national haut-valaisan, elle féministe zurichoise d’éducation protestante.

Il y a quelque chose de ce long métrage - le sujet, le style - dans Jusqu’au bout des rêves. Le couple, ici est celui de Katharina von Arx (1928-2013) et Freddy Drilhon (1926-1976). La première est connue en Suisse romande pour avoir tiré du passé le site clunisien de Romainmôtier. Avant de s’installer dans le village vaudois, elle avait été journaliste voyageuse, d’une grande indépendance envers les contraintes sociales qui attachaient les femmes à un homme et à un foyer. Elle a rencontré son mari en Polynésie, lors de reportages que, dès lors, ils ont poursuivis à deux.

Freddy Drilhon, journaliste, photographe et documentariste, avait fui le milieu de la haute bourgeoisie parisienne dont il était issu. Cependant, il a toujours traîné avec lui la blessure de son amour pour une mère qui le rejetait. Sa rencontre avec Katharina von Arx est déterminante. Mais leurs caractères exigeants provoquent de nombreux heurts. Ils finiront par vivre séparés, l’un en Grande-Bretagne où il trouve la tranquillité nécessaire à l’écriture, l’autre dans le canton de Vaud, obsédée par son «Prieuré», maison de l’Abbaye de Romainmôtier qui se confond avec son existence.

A partir de 2011, plusieurs entretiens avec Katharina von Arx, ainsi que ses archives - dont celles de Freddy Drilhon - ont amené Wilfried Meichtry à la réalisation de ce film, mi-documentaire, mi-fiction. Il s’y mêle des images réelles, les témoignages de Mme von Arx et ceux de sa fille, les superbes clichés de Freddy Drilhon, ses vidéos de Polynésie. Et puis il y a les séquences tournées avec des comédiens (Sabine Timoteo et Christophe Sermet), apportant la vie qui manque aux archives.

Le montage est très intéressant, la variété des styles anime le film et libère l’imagination des limites que lui donnerait le seul compte-rendu. Pourtant, dans la version française, ce plaisir est parfois altéré: les doublures jouent mal et le doublage se voit trop. Les sous-titres qui prévalent quand Katharina von Arx parle en allemand dérangent beaucoup moins.

Jusqu’au bout des rêves est à la fois l’histoire de deux personnalités singulières et celle de leur amour, solide, mais rendu difficile par des exigences qui n’ont pas su converger vers un projet commun. Elle est aussi celle d’une époque où le rôle assigné aux femmes pesait comme du plomb, où les préjugés se dressaient comme des bornes à ne pas franchir. Elle parle enfin d’une manière de faire du journalisme toute dévouée au travail de terrain et qui ne compte pas son temps. Tout cela en ramenant sporadiquement à l’écran le doux nid atemporel qu’est Romainmôtier, comme une trêve dans la vie agitée des deux protagonistes.


Geneviève Praplan

Appréciations

Nom Notes
Geneviève Praplan 12
Philippe Thonney 11