La Douleur

Affiche La Douleur
Réalisé par Emmanuel Finkiel
Titre original La Douleur
Pays de production France
Année 2017
Durée
Genre Drame
Distributeur Pathé Films
Acteurs Mélanie Thierry, Benoît Magimel, Shulamit Adar, Grégoire Leprince-Ringuet, Benjamin Biolay, Emmanuel Bourdieu
Age légal 12 ans
Age suggéré 14 ans
N° cinéfeuilles 783
Bande annonce (Allociné)

Critique

«La douleur, c'est le fossé, dont elle (Marguerite) se rend compte, qui sépare l'état dans lequel elle est et l'état dans lequel elle se met, et qu'elle donne à voir et…à lire.» Par cette affirmation, le réalisateur de La Douleur, Emmanuel Finkiel, pointe toute la complexité de cette œuvre magistrale. 

Adaptation du roman éponyme et autofictionnel de Marguerite Duras, La Douleur n'a rien d'un biopic. L'écrivaine ou les figures historiques telles que Robert Antelme ou encore Dionys Mascolo sont bien sûr convoquées, le climat de l'époque restitué, mais le film repose avant tout sur les émotions du personnage de Marguerite (Mélanie Thierry), retraduites par une distorsion de l'image, dont l'usage de longues focales rendant son environnement flou.
Paris, 1944. Dans une capitale en pleine Occupation allemande, Robert, figure de résistance, est arrêté. Sa femme, Marguerite, ne fait qu'attendre son retour. Oscillant toujours entre espoir et désespoir, cette interminable et langoureuse attente constitue le seul mode d'existence de l'écrivaine. Enfermée dans sa pensée, dépossédée d'ancrage dans le présent, elle est entièrement absente au monde. A la fin de la guerre, sans nouvelle de Robert, elle déambule, seule, égarée au milieu d'une foule ivre de joie.
S'il est manifeste qu'une douleur habite le personnage, sa cause n'est pas si évidente. Bien que la relation adultère entre elle et Dionys (Benjamin Biolay, taillé pour le rôle) ne soit dans un premier temps que suggérée et que ses fréquentes rencontres avec Pierre Rabier (Benoît Magimel), responsable de l'arrestation de Robert, soient prétendument entreprises pour obtenir des renseignements sur son mari, une seconde lecture se juxtapose à la première quant à son abandon complet à cette attente. Un indice surgit dès lors que s'opère ponctuellement à l'image un dédoublement de Marguerite : pendant qu'elle tourne en rond, désespère, languit, son double la regarde, la scrute, la juge. Conjointement à la souffrance qu'elle éprouve, elle s'en distancie en l'observant et la réutilisant à des fins littéraires.
Le second indice vient des questions rhétoriques et acerbes de Dionys, telle que «Etes-vous plus attachée à votre douleur ou à Robert Antelme?», ou encore une remarque qui suggère que la peine émerge bien plutôt d'une culpabilité d'oublier son mari chaque jour un peu plus… L'absence de ce dernier deviendrait alors l'occasion d'un but, d'un sens, reposant sur l'espoir, sans que les sentiments ne soient pour autant encore présents. Dès lors qu'advient-il lorsqu’un terme est mis à cette attente? Magnifique film sur les contradictions internes à l'individu, La Douleur ne peut que séduire, tout en laissant, par ses conclusions sombres mais lucides, un goût amer.

Sabrina Schwob

Appréciations

Nom Notes
Sabrina Schwob 18
Antoine Rochat 18
Geneviève Praplan 18
Georges Blanc 14