Critique
Deuxième long métrage de Marc Levin, WHITEBOYS met sous les projecteurs un Middle West désorienté par l’écroulement des valeurs sûres de naguère. L’agriculture ne paie plus et les fermes désaffectées s’additionnent. Les entreprises se portent mal, elles débauchent. L’un des derniers ouvriers entrés dans la ronde du chômage ne peut pas compter sur son fils. Le garçon est totalement absorbé par le rêve américain, autrement dit l’argent facile. La fortune devrait lui permettre d’accéder triomphalement aux scènes de Chicago, qui feront de lui une vedette du rap. Flip n’a d’autre personnalité que celle qu’il se compose en imitant les stars. Pire, il est persuadé qu’il est un Noir «à l’intérieur» et joue son personnage devant son miroir, alors que Bill Clinton se justifie à la télévision pour avoir fauté avec Monica Lewinski. Triste produit de la consommation, ridicule et misérable, Flip est le reflet de tous les individus sans caractère, qui ont pour seul repère la mode du moment.
WHITEBOYS n’est pas désagréable, mais pas non plus dépourvu de maladresse: une certaine complaisance sur les séquences de rap (Danny Hoch s’en explique par le fait que le Hip Hop a nourri son langage et sa vision du monde), des longueurs, un dénouement facile. La morale de l’histoire, trop brusquement amenée, contribue à sa fragilité. En revanche, le franc délire de Flip voulant être un Noir est drôle. En moins réussi, WHITEBOYS est à mettre aux côtés de BELLES A MOURIR, sorti au printemps de cette année. Dans les deux films, c’est la vacuité d’un certain état d’esprit américain, et la misère intellectuelle des campagnes profondes qui sont mises en lumière. Tandis que, loin du cinéma, la plus grande puissance économique du monde s’apprête à élire un nouveau président, en confondant tragiquement politique et fête foraine.
Geneviève Praplan