Elle

Que peut-il se passer dans la tête d’une fillette 10 ans lorsqu’elle voit son père commettre un massacre dans son quartier? Philippe Djian dans son livre Oh! paru en 2012 et Paul Verhoeven dans l’adaptation qu’il en fait tentent une réponse.

Aujourd’hui Michèle (Isabelle Huppert) est une adulte, responsable d’une maison de production de jeux vidéo.  Autoritaire, glaciale, elle dirige son monde sans le moindre état d’âme. Un soir, elle est violée chez elle; l’agression se reproduit. Elle fait tout pour découvrir qui est l’assaillant et finit par y réussir. S’installe alors entre eux un jeu malsain, inquiétant.

Certains parents laissent à leurs enfants un bien triste héritage. Verhoeven cherche-t-il à en mesurer le prix? Où se sent-il plus attiré par l’ambiguïté du personnage, par son déséquilibre psychique? «L’explication, c’est avant tout elle, Michèle, dans l’entièreté de sa personne. Quant à savoir si son caractère est originel ou si elle est devenue comme ça parce que… On ne sait pas», répond le réalisateur.

Film policier, Elle est donc surtout le portrait d’une femme à la psychologie étrange, peu attachante, toujours à la limite de la méchanceté. Le film semble se complaire dans ce qu’il y a de retors dans son caractère, dans sa sexualité. Ce n’est pas particulièrement agréable à suivre. D’autant moins que la tournure prise par l’action ne paraît pas toujours logique et que les constats restent superficiels.

Les personnages les plus touchants de cette triste aventure sont le mari (Charles Berling) et le fils (Jonas Jaquet), tous deux repoussés par Michèle, tous deux cherchant encore l’amour de cette femme cruelle. C’est chez eux qu’on trouve le plus de profondeur.

Isabelle Huppert réalise une fois de plus une performance. Y parviendrait-elle avec le même brio si elle changeait de registre? Celui d’une femme aimante et sociable, par exemple?

Geneviève Praplan

Michelle gère sa vie privée comme sa vie professionnelle, avec détermination.  Tout bascule lorsqu’elle  est violée chez elle et qu’un documentaire télévisé revient sur son père meurtrier et incarcéré. Magnifiquement incarnée par Isabelle Huper, toute de dignité et de froideur, ce film, dont le scénario est tiré de Oh… de Philippe Djian, est réglé comme du papier à musique : l’œuvre est forte, mais ne suscite guère d’émotion et au fond elle distrait sans interroger.  Jeux de pouvoir et de sexualité sont au centre de ce « je t’aime, moi non plus » où une relation trouble, étrange et malsaine  se met à unir victime et « bourreau ». Quand au sentiment religieux qui transparaît au travers de l’épouse de ce dernier, il est inconsistant, comme par hasard.

Tout est froid et virtuel : travail sur des jeux informatiques, relations affectives, argent, considération… Les images rendent bien ce climat délétère où les êtres sont bien souvent pris dans des rapports de force et de séduction  d’où la vraie vie semble s’absenter.

Serge Molla