Solas

Affiche Solas

Critique

Auteur de huit courts métrages, né en 1965, Benito Zambrano offre avec son premier long métrage un petit chef-d'oeuvre d'humanité, justement récompensé par le public des Festivals de Berlin et de Chicago, sans parler des nombreux Goyas (équivalents espagnols des Oscars) récoltés récemment. Il fait entendre une voix et montre une société bien différentes de celles reflétées par Almodovar.

Réalisé en Andalousie, loin de l'Eldorado cinématographique de Madrid et de Barcelone, le film évoque quelques personnages évoluant dans un quartier urbain déshérité, excellemment incarnés par des néophytes du long métrage. Il y a Maria (ardente Ana Fernandez), jeune nettoyeuse que son jules, chauffeur de train routier au long cours ne s'intéressant qu'à son corps, a engrossée; sa mère (extraordinaire Maria Galiana), campagnarde venue loger chez elle afin d'être plus près de son mari hospitalisé, vieux «macho» patriarcal et possessif; un voisin d'immeuble, vieillard solitaire et timide (magnifique Carlos Alvarez Novoa), et son chien; le tenancier d'un bar minable.

Les pauvres destinées se croisent, parfois illuminées d'un peu de tendresse grâce notamment au tenancier au grand coeur et à un médecin d'hôpital lucide. Maria gardera-t-elle son enfant malgré un avenir apparemment sombre? Sa mère sera-t-elle condamnée à subir en silence un mari despotique? Le voisin finira-t-il ses jours sans autre compagnie que celle de son ami à quatre pattes? Bien sûr, on est loin des figures et des décors sophistiqués de la «movida», mais combien plus près de la véritable comédie humaine. A certains égards, on serait tenté de parler d'un film bergmanien sous le soleil andalou, avec des personnages pitoyables au sens où ils font naître non pas une pitié condescendante mais une réelle compassion.

Au-delà d'une apparente noirceur assez goyesque, SOLAS rayonne malgré tout de tendresse, de dignité et d'espoir.

Daniel Grivel