Bang Gang (une histoire d'amour moderne)

Affiche Bang Gang (une histoire d'amour moderne)
Réalisé par Eva Husson
Pays de production France
Année 2014
Durée
Musique White Sea
Genre Drame
Distributeur agorafilms
Acteurs Finnegan Oldfield, Marilyn Lima, Daisy Broom, Lorenzo Lefebvre, Fred Hotier
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 738
Bande annonce (Allociné)

Critique

Peut-on blâmer un film pour ce qu’il représente une réalité devenue dominante dans notre société? Tout dépend du regard qu’il porte sur cette réalité. Et il est difficile d’en voir un tout court dans la représentation qu'Eva Husson fait de l’amour libre moderne. Ce mode de rapports, sans attache, avec pour but le plaisir immédiat des corps est effectivement devenu celui de la jeunesse actuelle (et peut-être pas que de la jeunesse), prenant la même place qu’a pu tenir avant elle la monogamie maritale. Doit-on pour autant s’en réjouir? Le film d’Eva Husson ne semble pas spécialement dire le contraire. Alors que la canicule se prolonge lors d’un long été de torpeur, un groupe de jeunes lycéens instaurent un rendez-vous régulier dans la maison de l’un d’entre eux: les «bang gang». Ainsi, ils se construisent un monde où jeux sexuels, drogue et musique électro mènent la danse. Mais l’été a forcément une fin.

D’après ses déclarations, la réalisatrice s’est inspirée d’un fait divers américain, qui l’avait marquée dans sa jeunesse, et il lui tenait à cœur de montrer la solitude abyssale de ces êtres en recherche. Dommage que l’entièreté du film résiste absolument à cette description. L’absence de toute psychologie ou profondeur accordée aux personnages, les clichés abondants utilisés autant pour caractériser leurs relations – en dehors du sexe – que pour les maigres fils narratifs qui entourent le tout, l’esthétisation à outrance du sujet (la forme effectivement très belle est ici malvenue) font de Bang Gang une démonstration de la plus pure complaisance. Le problème ne réside pas dans la nudité, si présente qu’elle en devient banale, ni même dans l’idée d’amour libre mais dans la dédramatisation totale des conséquences que ce genre de rapports peut engendrer. Car si chacun a en effet le droit d’aimer comme bon lui semble, la volonté actuelle de défendre ce droit a amené à en faire un carcan social tout aussi pesant que celui qu’il cherchait à remplacer.

Respect, confiance, dialogue et considération de l’autre dans toute son épaisseur d’être ont trop souvent tendance à être balayés, négligés. Les sentiments sont devenus secondaires, là où la sexualité s’est imposée comme centre des relations et clé de réussite sociale (il suffit de poser les yeux sur le premier magazine féminin venu pour le vérifier). En parler oui, mais en parler bien. Parce qu’elle fait de son histoire une parenthèse estivale bien vite résolue, qui ne semble pas laisser de traces sur ses protagonistes, Eva Husson banalise les blessures, les pressions liées à cette nouvelle manière d’aimer, que tant de jeunes suivent plus par désenchantement ou envie d’intégration que par réel désir. Que la faible voix de la réalisatrice ait cherché à dire davantage ne change rien; on reste profondément découragé devant cette image vide de réflexion d’une jeunesse qui aurait pourtant besoin qu’on l’assure d’autres chemins. Ce n’est en tout cas pas là qu’elle les trouvera.

Adèle Morerod

Appréciations

Nom Notes
Adèle Morerod 3
Georges Blanc 3