Star

Affiche Star
Réalisé par Anna Melikian
Pays de production Russie
Année 2014
Durée
Genre
Distributeur trigonfilm
Acteurs Tina Dalakishvili, Severija Janushauskaite, Gosha Kutsenko, Andrei Smoliakov, Pavel Tabakov, Juozas Budraitis
Age légal 16 ans
Age suggéré 16 ans
N° cinéfeuilles 728

Critique

On parle de Star comme d’un conte. Mais son réalisme contredit cette interprétation et la façon dont se croisent des personnages peu destinés à se rencontrer prouvent davantage une belle qualité d’écriture qu’une volonté de donner dans le merveilleux.

Jeune fille seule, Macha (Tina Dalakischwili) ne possède qu’une chose, le désir forcené de devenir une grande actrice. Elle semble inconsciente de son absence de talent mais sait très bien qu’elle n’est pas belle. Tout en se présentant à chaque audition, à chaque offre d’emploi dans des boîtes de nuit, elle cherche éperdument l’argent nécessaire à une série d’interventions chirurgicales, les oreilles, les lèvres, les seins… Ce faisant, elle tombe sur Kostia (Pavel Tabakov) qui veut bien voler pour lui donner un coup de main. Pendant ce temps, dans un quartier ultra-chic de Moscou, Sergueï (Andrei Smoliakov) est ministre et oligarque. Sa femme Rita (Severija Janushauskaite) joue les vedettes de la philanthropie.
La frontière est toute naturelle entre le décor du couple de parvenus et celui de Macha. On pourrait y voir une lecture en noir et blanc de la vie moscovite. D’un côté le design glacé de la richesse, une ville dominée par des tours luxueuses tandis que celles qui sortent du sol ouvrent des chantiers de neige et de boue. Dans ce quartier informe se trouve le foyer de Macha, installée au rez de chaussée d’un immeuble en construction; ce niveau-là est celui du chômage et de la pauvreté endémiques.

Pourtant, Macha, Kostia, Rita et Sergueï se rencontrent, chacun faisant ressortir les caractéristiques de l’autre. C’est dans ce chassé-croisé de caractères que la réalisatrice parvient à construire un scénario exemplaire par sa cohérence et sa complexité. Car au lieu d’exacerber les antagonismes, elle met en lumière les fissures des deux mondes, fissures qui rassemblent plus qu’elles ne séparent.

Rien n’est simple, ni dans la vie, ni dans ce cinéma-là qui naît d’observations de la réalité. «Lorsque j’ai imaginé Star, je voulais faire un film sur la vie parce que je sentais très fort, à chaque moment, qu’on doit se réjouir de chaque jour, de chaque minute vécue. C’est exactement ce sentiment que Macha porte en elle», résume Anna Melikian qui est servie par d’excellents acteurs.

Macha, pour qui seule compte l’apparence, ressemble à Rita dans sa Porsche jaune et ses vêtements de marque; l’argent remplit les poches mais vide l’âme et l’esprit. Les deux femmes sont aussi marginales l’une que l’autre, tout comme les deux hommes, Sergueï obsédé par son état de santé, Kostia rôdant des quartiers riches aux quartiers pauvres sans pouvoir se situer. Ces gens-là mettront du temps à ranimer leur égard pour les autres, à finalement apprendre à vivre.

Mais si Anna Mélikian tourne en dérision le souci de paraître, met en évidence les abimes de solitude qu’il dissimule, elle sait aussi, et merveilleusement, se pencher sur ses personnages pour en tirer tout ce qu’ils sont en mesure d’offrir. Si bien que, nul n’étant tout bon ou tout mauvais, l’histoire surprend sans cesse, détourne à chaque fois la suite attendue et rappelle constamment qu’il ne faut jamais se fier aux apparences. A celles du film non plus!

Geneviève Praplan

Appréciations

Nom Notes
Geneviève Praplan 18
Georges Blanc 14