Deux jours, une nuit

Affiche Deux jours, une nuit
Réalisé par Jean-Pierre, Luc Dardenne
Pays de production France, Belgique
Année 2014
Durée
Genre Drame
Distributeur xnix
Acteurs Fabrizio Rongione, Marion Cotillard, Catherine Salée, Pili Groyne, Simon Caudry
Age légal 10 ans
Age suggéré 14 ans
N° cinéfeuilles 703
Bande annonce (Allociné)

Critique

Centré sur un fait divers qui dessine en filigrane le drame de beaucoup de travailleurs, les frères Dardenne consacrent leur nouveau film à un bel exemple de courage.
Deux jours, une nuit, soit un week-end, c’est le temps dont dispose Juliette (Marion Cotillard), soutenue par son mari (Fabrizio Rongione), pour essayer de conserver son travail. Dans une fabrique de panneaux photovoltaïques trop rudement secouée par la concurrence chinoise, le patron doit resserrer son budget. Incapable de trouver une solution, il en laisse la responsabilité à ses employés. L’alternative est simple, soit ils renoncent à leur prime annuelle de mille euros, soit ils acceptent le licenciement de Juliette qui sort d’un long congé maladie. La jeune femme va tenter de parler à chacun de ses collègues pour qu’ils la soutiennent.
On ne peut pas, quand on a la sensibilité sociale de Jean-Pierre et Luc Dardenne, ignorer le rôle que jouent les chefs d’entreprise dans la fluctuation des chiffres du chômage. Ici, l’arbitrage demandé aux employés est cruel. Pourtant, les réalisateurs ne s’y appesantissent pas, laissant tout au plus quelques termes du dialogue le signifier afin de bien poser le décor. Il n’y pas de place pour les excès, les révoltes, les crises; l’enjeu consiste, à partir d’un cas, à décrire un état de fait. Si le chômage est devenu, pour beaucoup, une préoccupation centrale, il y a aussi de la place pour la lutte.
Plusieurs thèmes se dégagent de cette œuvre. D’abord, elle met en évidence l’indispensable solidarité du couple. Ensuite, elle parle de la dualité qui peut déchirer les consciences, sauver ma peau ou celle des autres ? Enfin, elle montre que le sens des responsabilités est avant tout une affaire personnelle; celui qui se défend ne le fait pas toujours en vain et son combat peut lui ouvrir des horizons inattendus.
Pour Juliette (Marion Cotillard est parfaite), la difficulté est décuplée par la dépression qui l’a tenue à l’écart de son travail et qui, maintenant, menace ses moyens de défense. Comment peut-elle s’y prendre  Comment sa famille accuse-t-elle le choc ? Où son mari puise-t-il le surcroît de patience, d’encouragements infiniment répétés pour obtenir d’elle – et d’elle seule - la réaction et la ténacité voulue ?
A travers les collègues rencontrés les uns après les autres, c’est un inventaire des soucis, des choix de chacun que dressent les réalisateurs. Ce sont  les situations diverses, les sentiments mêlés, la conscience dérangée, le rejet ou le remords qui en disent long sur une classe sociale. On peine à nouer les deux bouts et les ambitions ne dépassent guère celle de satisfaire ses besoins de consommation. Juliette doit constamment s’adapter à des réactions différentes, pas toujours empathiques.  Entre les preuves d’amitié et le «chacun pour soi» qu’on lui manifeste, sa lutte est constamment à rééquilibrer.
Les frères Dardenne dirigent habilement les personnages dans les ambiguïtés qui les traversent. De la délicatesse, de la tendresse, de la compréhension, ils en font preuve de bout en bout. La mise en scène est sobre, dévouée au sujet - cette Juliette  qui court d’une porte à l’autre, se réjouit, se désespère. Tandis que le week-end coule lentement dans sa pénible tension. Jusqu’à la fin, jusqu’au dernier plan, rien n’anticipe sur l’issue du combat. Et quand celle-ci sera connue, ce sera pour un revirement insoupçonné dans lequel se reconnaîtra la véritable victoire.

Geneviève Praplan

Appréciations

Nom Notes
Geneviève Praplan 18
Georges Blanc 15
Daniel Grivel 18
Nadia Roch 10
Antoine Rochat 18
Philippe Thonney 10
Anne-Béatrice Schwab 18