Critique
Au large du Canada, Saint-Pierre est une petite île, française depuis 1814, où l'on connaît mieux l'hiver que la belle saison. Mais le gel n'éteint pas l'amour qui unit le Capitaine (Daniel Auteuil) et son épouse, Madame La (Juliette Binoche). Une nuit, un homme est assassiné à coup de couteau, les coupables sont arrêtés, jugés et condamnés. Neel Auguste (Emir Kusturica) est destiné à l'échafaud. Mais à Saint-Pierre, il n'y a pas de guillotine, il faut attendre qu'on l'envoie de France. Au long des mois qui s'écoulent, Neel est pris sous la protection de Madame La et devient peu à peu un autre homme. C'est cette transformation qui intéresse Patrice Leconte, et qui incite Kusturica à devenir acteur pour l'incarner.
Le thème est intéressant, mais le résultat l'est moins. La mise en scène fait trop de place à l'histoire d'amour, aux dépens de ce développement psychologique dont on attendait le meilleur. La candeur de Madame La est souvent pénible. Quant à Kusturica, ses vrais exploits cinématographiques sont encore ceux qu'ils réalisent derrière la caméra.
On est loin de LA FILLE SUR LE PONT, le très beau précédent film de Patrice Leconte. Si LA VEUVE DE SAINT-PIERRE résiste à la critique, c'est par l'ampleur des paysages et éventuellement pour le romanesque de l'histoire. Mais surtout, par la forte présence de Daniel Auteuil.
Geneviève Praplan