Le majordome

Affiche Le majordome
Réalisé par Lee Daniels
Titre original The Butler
Pays de production U.S.A.
Année 2013
Durée
Musique Quincy Jones, Rodrigo Leão
Genre Drame, Biopic
Distributeur frenetic
Acteurs Forest Whitaker, John Cusack, Jane Fonda, Mariah Carey, Oprah Winfrey
N° cinéfeuilles 686
Bande annonce (Allociné)

Critique

C'est un article paru dans le Washington Post qui a inspiré le réalisateur afro-américain Lee Daniels (Precious et Paperboy, dont on attend désespérément la distribution en Suisse depuis Cannes 2012). Après l'élection de Barack Obama, le journaliste Will Haygood cherchait un Noir américain qui ait travaillé pour la Maison-Blanche et été un témoin privilégié du mouvement pour les droits civiques. Il l'a trouvé en la personne d'Eugene Allen, qui a été au service de huit présidents des années 50 aux années 80.

De par sa durée et l'ampleur de la période considérée, Le majordome est à la fois une fresque évoquant plus de trois décennies de l'histoire étasunienne et une saga familiale. En 1926, alors encore enfant, Cecil Gaines voit son père, cueilleur de coton, révolvérisé par le planteur blanc qu'il avait apostrophé pour avoir forcé sa femme. Le gamin est pris en main par la tante de l'assassin, qui en fait un «house nigger», un petit domestique en livrée. Devenu grand, Cecil (Forest Whitaker) quitte la plantation, est engagé par un frère de couleur âgé, majordome dans un hôtel réservé aux Blancs. Son mentor lui conseille d'être aussi incolore et insonore que possible: la pièce qu'il occupe doit donner l'impression qu'elle est vide...
Marié à Gloria (Oprah Winfrey, meilleure actrice qu'objet de la déculottée de SuisseTourisme...), père de deux fils, Louis (David Oyelowo) et Earl (David Banners), Cecil voit son statut s'améliorer: après s'être fait remarquer par ses compétences dans un palace de Washington, il est recruté comme majordome à la Maison-Blanche, où une bonne partie du personnel subalterne est de couleur - et moins payée que les collègues blancs... Sa longue carrière permet au spectateur de rencontrer notamment Eisenhower, Kennedy, Johnson, Nixon, Reagan, et des figures marquantes des droits civiques comme Martin Luther King  et le Rév. James Lawson. Lee Daniels montre en passant que des présidents décriés comme Johnson et Reagan ont pourtant fait progresser la cause grâce au vote de lois égalitaires.
Plus que la chronique des coulisses de la Maison-Blanche, Le majordome campe un personnage pris entre ses ambitions civiques et son désir de servir son pays. En face de lui, deux fils incarnant son dilemme: l'aîné, Louis, lui reproche sa servilité (égratignant au passage Sidney Poitier qu'il traite d'Oncle Tom millionnaire...) et, après avoir milité aux côtés du pasteur King, opte après son assassinat pour l'option plus radicale des Black Panthers, au grand dam de son père; le cadet, Earl, s'engage dans l'armée et trouvera la mort au Viêtnam. Gloria quant à elle, se sentant délaissée par un mari que sa fonction accapare, est tentée par une aventure; elle boit et fume trop.
Lee Daniels souligne que son film est le plus difficile qu'il ait réalisé, s'étant imposé une retenue inhabituelle chez lui. Il ajoute: «La question se pose de savoir qui a tort ou raison: est-il juste de servir le Président et d'être dans une forme de passivité? En obtenant des Blancs qu'ils vous fassent confiance, peut-on faire avancer la cause des gens de couleur? Ou vaut-il mieux organiser des manifestations, prendre la parole publiquement et être prêt à sacrifier sa vie pour ses idées? Ce sont ces questions qui font bondir Cecil et ce sont les mêmes qui m'ont donné envie de plonger dans cette histoire avec le même enthousiasme que j'ai eu pour Precious
Forest Whitaker domine par sa prestance et son rayonnement une distribution au demeurant éblouissante, et l'on comprend que le film caracole en tête du box office étasunien. Et citons pour finir le président Obama: «J'ai vu Le majordome  et j'ai pleuré. J'ai pleuré non seulement parce que je pensais aux majordomes qui ont travaillé ici à la Maison Blanche, mais aussi à une génération entière de gens qui étaient capables et talentueux, mais ont été bridés à cause des lois raciales, à cause des discriminations. Et pourtant, avec dignité et ténacité, ils se sont levés tous les jours pour aller travailler, et ont supporté beaucoup de choses parce qu'ils espéraient des jours meilleurs pour leurs enfants.»
 

Daniel Grivel

Appréciations

Nom Notes
Daniel Grivel 17
Georges Blanc 15
Serge Molla 14