A tombeau ouvert

Le nouvel opus de Scorsese, de l'aveu même du cinéaste, tient un peu de TAXI DRIVER, sauf que, au lieu que l'on y trucide les gens, on essaie de leur sauver la vie. Nous entrons en effet dans la vie quotidienne de l'«Emergency Medical Service», le Service médical urgent de la ville de New York, dont on a l'impression qu'il est réparti entre plusieurs compagnies d'ambulances se livrant une concurrence acharnée: c'est à qui sera le premier sur les lieux d'un accident ou d'une agression.

Deux jours et trois nuits de la vie de Frank Pierce (Nicolas Cage, qui retrouve un peu son rôle d'ange gardien de CITY OF ANGELS), employé paramédical oeuvrant sur le front de la souffrance dans un quartier new-yorkais surnommé «la cuisine de l'enfer». Hanté par le souvenir d'une victime qu'il n'est pas parvenu à sauver, il croit la reconnaître dans chaque figure qu'il rencontre.

Au-delà de la destinée d'un homme broyé par la violence et la souffrance humaines, BRINGING OUT THE DEAD fait le portrait de modestes héros quotidiens pratiquant une sorte de médecine de guerre et se protégeant par une carapace d'humour noir. Faits à tout, rien ne les surprend, et ils connaissent tous les trucs auxquels peuvent recourir des patients astucieux dé­sireux d'obtenir ce qu'ils veulent.

Dans des décors suggestifs, sous des éclairages savants, se déroule la fresque d'un monde frénétique parfois traversé par quelques franges de sérénité. Scorsese reste le cinéaste baroque et flamboyant que l'on connaît, et il utilise à merveille les rocks d'époque (Van Morrison, The Clash, The Who, etc.), le tout nappé d'une excellente sauce signée Elmer Bernstein.