La cage dorée

Quand Amalia Rodrigues chantait «Uma casa portuguese», les immigrés rêvaient de leur pays, de ce qu’ils y avaient laissé, qu’ils ne reverraient peut-être jamais. José (Joachim de Almeida) a collé la photo de sa vieille maison dans son armoire de vestiaire et, chaque fois qu’il reprend son travail au chantier, il s’en souvient. Pourtant, il s’est habitué à Paris où il vit depuis plus de trente ans. Sa femme (Rita Blanco) est concierge dans un immeuble cossu des grands boulevards. Mais voilà qu’un héritage inattendu bouleverse leur quotidien sans histoire. Travailleurs modèles, ils n’osent pas annoncer leur départ à leurs patrons. Quant à leurs deux enfants, nés en France, ils n’ont aucune envie de retrouver leurs racines.

D’origine portugaise, l’acteur Ruben Alves vit en France et observe sa communauté, ces immigrés qui travaillent dur et réussissent plus ou moins, à l’instar de ses parents. «A trente-deux ans, j’avais assez de recul, je pouvais en tirer une histoire.» Il en a fait son premier film, comédie attachante qui joue habilement avec les clichés. «Je ne voulais surtout pas tomber dans la caricature, mais il y a quand même des traits qui valaient la peine de s’y attarder pour s’en amuser avec tendresse.» Alves peint un milieu social dont le statut serre parfois un peu trop aux épaules, une envie marquée de bien faire pour que les différences se réduisent, un désir d’être soi. Il pointe aussi les sentiments de la deuxième génération: est-elle portugaise ou française? En face d’eux, les Français sont traités à égalité, le miroir est à double face.

Tout cela, ma foi, ne manque pas de finesse. Ni dans le scénario, ni dans le jeu des comédiens principaux, Joachim de Almeida et Rita Blanco que le réalisateur est allé chercher parmi les grands comédiens du Portugal. Eux aussi savent de quoi ils parlent. Et ils en parlent bien.