Critique
Les bidonvilles de Manille grouillent de pauvres gens qui tirent leur subsistance des décharges, de petites rapines, voire pire. Comme Mila (Eugene Domingo), mère de sept enfants qu’elle nourrit jour après jour de soupe aux nouilles et qui se décide à livrer son aînée à un riche pédophile. Le film va-t-il plonger dans la misère des Philippines? Pas vraiment car le drame évoqué par les premières séquences est une sorte de mise en abyme. Il constitue le projet que veulent mener à bien le producteur Bingbong (J. M. de Guzman) et son ami Rainier (Kean Cipriano), réalisateur. Les deux compères appartiennent au cinéma indépendant; ils comptent démontrer qu’il est possible de participer aux festivals et même d’être candidat aux oscars sans appartenir à un grand studio. Pour l’heure, ils discutent des principales séquences et cherchent les acteurs.
THE WOMAN IN THE SEPTIC TANK - littéralement: la femme dans la fosse septique - comporte donc deux lectures, l’une drôle, l’autre tragique, qui tendent à s’exacerber réciproquement. Car les cinéastes proviennent d’un milieu aisé, mais filment le réel en se déplaçant sans vergogne dans les plus sordides ruelles de leur ville. Choc des classes sociales que le projet de film voudrait relier… et qui s’affermit lorsque la star du pays - Eugene Domingo joue son propre rôle - explique sa philosophie avec force cabotinage.
Marlon N. Rivera brosse ici le portrait du cinéma philippin. Ses personnages sont d’ailleurs confrontés à un «héraut» du cinéma commercial à son retour du Festival de Venise, occasion d’échanges ironiques qui ne font que stimuler Bingbong et Rainier. «Aux Philippines, explique le réalisateur, le cinéma indépendant est supposé offrir une alternative aux quatre studios qui produisent la même chose jour après jour. Mais au lieu de construire un nouveau langage cinématographique, nous avons bâti nos propres clichés de ce que devrait être ce cinéma indépendant.»
L’un de ces clichés est bien sûr le sujet: «Pauvreté, pornographie de la pauvreté et ainsi de suite…» Le réalisateur en tire la leçon pour lui-même et n’hésite pas à piéger ses personnages. Dans cette comédie sympathique, un rien burlesque, c’est la misère qui dit le dernier mot!
Note: 12
Geneviève Praplan
Appréciations
Nom |
Notes |
Georges Blanc |
11 |
Geneviève Praplan |
12 |
Antoine Rochat |
13 |