Hitchcock

Affiche Hitchcock
Réalisé par Sacha Gervasi
Pays de production U.S.A.
Année 2012
Durée
Musique Danny Elfman
Genre Biopic
Distributeur Twentieth Century Fox France
Acteurs Anthony Hopkins, Scarlett Johansson, Toni Collette, Helen Mirren, Danny Huston
Age légal 14 ans
Age suggéré 14 ans
N° cinéfeuilles 674
Bande annonce (Allociné)

Critique

Que n’a-t-on dit ou écrit sur Alfred Hitchcock! Sur son mépris total pour les acteurs, affirmation vigoureusement démentie par James Stewart ou Cary Grant; sur son approche étonnante de la nourriture: dans certains de ses films, manger devient presque un acte érotique; sur sa sexualité refoulée, le faisant fantasmer sur des actrices blond platine, qu’il façonnait impitoyablement. Sur sa tyrannie et son perfectionnisme… et bien sûr, sur son talent, toujours éclatant aujourd’hui, et reconnu de tous.

Mais nul besoin d’être un spécialiste du cinéaste pour entrer avec bonheur et dès la première minute dans ce film formidable. Il relate une courte période de la vie d’Hitchcock, la préparation, le tournage et la sortie de son film PSYCHOSE, et toutes les pérégrinations qui s’y rattachent. On assiste à une leçon d’histoire sur le cinéma américain et la préparation d’un film dont personne ne voulait. Alors que tout le monde veut le voir faire une nouvelle version de LA MORT AUX TROUSSES, il s’enthousiasme pour cette histoire d’horreur à laquelle il est seul à croire. Hypothéquant sa maison pour pouvoir réaliser le projet, essayant de convaincre même ses collaborateurs les plus dévoués, encaissant sans faiblir les refus de ses producteurs.

D’irrésistibles scènes nous montrent la manière dont le cinéaste va embobiner un impitoyable censeur refusant qu’une cuvette de toilettes soit montrée en gros plan. Le tournage de la scène dans la douche, la recherche de ses acteurs, tout est montré avec ce sens de l’humour à froid que possédait le cinéaste. Le tout entrecoupé de moments émouvants, comme la conversation avec l’actrice Vera Miles. On comprend là que sa plus grande blessure est la perte de son idéal féminin, femme fantasmée et actrice idolâtrée, Grace Kelly, quittant pour toujours les plateaux pour devenir princesse. L’homme qui lui a offert ses plus beaux rôles le ressent comme une grande trahison, provoquant une infinie tristesse. De Kim Novak à Eva Marie Saint, en passant évidemment par Tippi Hedren, il ne cessera par la suite de tenter de la retrouver, voire de la recréer.

Le film se concentre également sur la relation unique entre Alfred et sa femme, assistante et collaboratrice indispensable, Alma Reville (Helen Mirren, sublime). Un des beaux moments est celui dans lequel il lui fait une scène de jalousie. Bouleversée et blessée, Alma lui jette à la figure, comme preuve de son amour pour lui, tous les sacrifices, tout le travail et la difficulté qu’il y a à «être la femme d’Alfred Hitchcock». Et cette autre scène, lors de la première triomphale de PSYCHOSE, où il lui dit qu’aucune blonde hitchcockienne ne pourra jamais la remplacer dans son cœur; elle lui répond que cela fait trente ans qu’elle attend qu’il lui dise cela; «C’est pour ça qu’on m’appelle le maître du suspense», lui dit-il...

Après Nixon ou Picasso, Anthony Hopkins endosse à la perfection le rôle écrasant de ce créateur hors du commun, tendre, complexé, infatigable, parfois tyrannique et enfantin. Il recrée magnifiquement la voix et la diction de son modèle, ainsi que sa silhouette si familière, et nous offre quelques réjouissants numéros d’acteur, comme lorsqu’il écoute, caché derrière la porte, les cris d’angoisse des tout premiers spectateurs de PSYCHOSE.

Une autre grande intelligence du scénariste est d’avoir recréé en plusieurs occasions l’ambiance de la série ALFRED HITCHCOCK PRESENTE, où le Maître, avec un humour noir débordant, s’adressait directement à la caméra. La toute dernière scène du film en est un exemple éclatant, dans lequel culmine le mélange entre rires et émotion.

Réalisé par Sacha Gervasi, HITCHCOCK est une totale réussite. Sublimement interprété, passionnant de bout en bout, bourré d’humour et de clins d’œil, étonnant, ce film est à voir de toute urgence. Et obligatoirement en V.O.

Note: 18

Philippe Thonney

Appréciations

Nom Notes
Philippe Thonney 18
Georges Blanc 18