Trois mondes

Les cloisons sociales sautent parfois, notamment à l’occasion d’un drame. Al (Raphaël Personnaz), d’origine modeste, est sur le point d’épouser la fille de son patron et devenir le «boss». Mais, au retour de l’enterrement de sa vie de garçon avec ses deux copains, il renverse très violemment un inconnu. Les fêtards s’enfuient, mais une jeune femme, Juliette (Clotilde Hesme), a tout vu. Elle porte secours à la victime, puis, ultérieurement, rencontre à l’hôpital sa compagne et retrouve même le fuyard rongé de remords… Les questions éthiques se multiplient. Comment assumer un acte qui fait basculer l’existence? Comment se pardonner sa couardise et se faire pardonner? Faut-il dénoncer un fuyard?… Et comme si toutes ces questions ne suffisaient pas, la réalisatrice explore maladroitement l’amour et la conjugalité, suggère qu’une forte perturbation psychique pourrait facilement pousser deux êtres l’un vers l’autre. Et comme en bonus, quelques interrogations sur les sans-papiers et leurs droits, sur la gratuité du don d’organes, etc. Ce trop plein au niveau du scénario est en outre desservi par un comédien d’une belle gueule (à la Delon), mais totalement inexpressif! Dommage, vu le sujet initial susceptible d’interroger chacun.

Serge Molla

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Al (Raphaël Personnaz) s’apprête à épouser la fille de son patron et à lui succéder à la tête de son entreprise. Une nuit, alors qu’il enterre sa vie de garçon avec des copains, passablement éméché au volant d’une grosse cylindrée, il renverse un inconnu, abandonne le blessé et s’enfuit. Une jeune femme, Juliette (Clotilde Hesme), attirée à la fenêtre par le bruit de l’impact, est témoin de la scène de l’accident.

A partir de cet instant, trois mondes complètement déconnectés entre eux, trois univers hermétiques vont être confrontés et voir leurs frontières éclater sous la violence du choc de la collision. Le jeune chauffard à l’avenir radieux, poussé par ses camarades et l’entourage à garder le silence, est rongé par la culpabilité. Juliette l’étudiante en médecine offre ce qu’elle possède, l’empathie, l’écoute et une intelligence bienveillante. Et Vera (Arta Dobroshi), l’épouse de la victime, étrangère enfermée dans la clandestinité et soutenue par sa communauté, subit son malheur la rage au cœur. Le parcours de vie de chacun des protagonistes va être totalement bouleversé.

Dans ce film d’action, Catherine Corsini pose des questions morales essentielles: pour réussir socialement et matériellement, jusqu’où est-on prêt à sacrifier la vérité, la justice, sa propre conscience et sa paix intérieure? Peut-on racheter une faute avec de l’argent? Quel est le prix d’une vie? Et quid du désir de vengeance?

Ce sont les dilemmes intérieurs des personnages, les décisions prises ou repoussées et les conséquences de leurs actes qui font avancer l’histoire de ce film noir. Comme dans un thriller, il y a du suspense, mais ce sont les rebondissements émotionnels et les mouvements de conscience qui déterminent l’action.

Peut-être y a-t-il dans le scénario quelques parenthèses qui égarent et font perdre le fil, mais ces trentenaires confrontés à des choix moraux nous touchent. C’est bien dans notre monde que TROIS MONDES s’enracine.

Anne-Béatrice Schwab