Balkan Melodie

Le premier plan s’ouvre sur un panorama du Haut-Léman, puis l’objectif se resserre sur une propriété qui domine Lavaux. C’est là qu’habitent Marcel et Catherine Cellier, ces chasseurs de musiques traditionnelles qui ont sillonné la Roumanie et la Bulgarie dès les années 50. On leur doit la découverte, pendant les années communistes, de Gheorghe Zamfir et des choristes du «Mystère» des voix bulgares.

Ce rappel posé, Stefan Schwietert va plus loin. Que sont devenus les artistes dont le couple suisse a fait des vedettes? Il les retrouve dans leur pays, un peu désenchantés, et en profite pour éclairer le rôle joué par le parti communiste dans le développement de ces musiques. «Glorifiant la figure du paysan et du travailleur chère aux révolutions soviétiques, la musique traditionnelle populaire se voit positionnée parmi les priorités. Les musiciens, jadis nomades, deviennent des employés d’Etat et se produisent au sein des grands orchestres.» La chute du mur a cassé leur ascension.

Dépité parce qu’il s’est senti exploité par les Cellier, Zamfir enseigne la flûte de Pan dont il est devenu un défenseur intégriste. Les chanteuses bulgares ne sont plus des professionnelles mais répètent désormais des pièces que leur écrivent des compositeurs contemporains en gardant leur timbre rauque caractéristique, issu du Moyen Age. Et puis il y a les nouveaux venus, comme Mahal Rai Banda, qui ont réussi à vivifier la tradition pour créer une œuvre nouvelle.

Intéressant et largement illustré par la musique, Balkan Mélodie montre des réactions diverses aux changements de régime et donne des points de vue différents, selon qu’on vit en Suisse ou dans les ex-pays de l’Est. Schwietert s’appuie sur les images filmées en son temps par Catherine Cellier et construit le monde d’aujourd’hui avec son propre matériel. Il croise des passions intactes et des talents réels, qui n’ont plus, aujourd’hui, que leurs propres moyens pour se faire connaître. Mais c’est ainsi qu’ils ont retrouvé leur authenticité.