Trois fois 20 ans

Affiche Trois fois 20 ans
Réalisé par Julie Gavras
Pays de production France, Belgique, Grande-Bretagne
Année 2011
Durée
Musique Sodi Marciszewer
Genre Comédie dramatique, Comédie, Romance
Distributeur Gaumont Distribution
Acteurs William Hurt, Isabella Rossellini, Doreen Mantle, Kate Ashfield, Aidan McArdle
N° cinéfeuilles 641
Bande annonce (Allociné)

Critique

Sur le plan personnel ou conjugal, la retraite qui se profile fait souvent peur. Et c’est l’intérêt de ce film d’examiner ce que cela signifie concrètement pour deux êtres qui jusque-là avaient su tisser leur relation. Pourtant, tout à coup, ils peinent.

«Mourir, cela n’est rien, mais vieillir.» Dans une société où l’on est considéré comme vieux et qualifié de senior, au moins à partir de 60 ans, il est de moins en moins simple d’atteindre cette étape. Mary et Adam sont dans ces eaux-là et vient le temps de repenser leur couple. Elle gère brillamment enfants, petits-enfants, travail et amis avec son cortège de joies et de soucis, lui est au faîte de sa carrière professionnelle d’architecte. D’ailleurs, le prix qui vient de lui être décerné ressemble à un embaumement. Vieillir et en prendre conscience débouche donc sur une véritable crise de croissance, tant individuelle que conjugale. Vérifier que l’on peut encore séduire, créer, entreprendre et s’engager une nouvelle fois dans un stimulant projet professionnel, tout cela paraît nécessaire, comme pour bien (dé)montrer - moins aux autres qu’à soi-même - que l’on n’est pas vieux. En conséquence, le «jeunisme» de l’un et la volonté excessive de bien faire de l’autre génèrent plus de problèmes qu’ils n’en résolvent. Clash et séparation apparaissent inéluctables au «vieux» couple, à moins que la vie ou la mort ne déroute ce fatal glissement.

Magnifiquement porté par Isabella Rossellini (Mary) et William Hurt (Adam) et d’excellents acteurs pour les rôles secondaires, ce film aborde avec pudeur et humour les défis auxquels sont confrontés bien des couples qui, une fois les enfants élevés et indépendants, doivent trouver une nouvelle place, face aux autres et à eux-mêmes. Un temps différent s’offre à eux, non pas un temps de repli, de qualité inférieure aux précédents, mais un temps autre et donc porteur de nouvelles découvertes.

Dans une scène clé, Mary et Adam sont appelés concrètement, physiquement, à se regarder autrement et à redécouvrir l’altérité de leur conjoint, et donc la promesse de nouveaux partages non rongés par l’habitude. En quelques regards, tout est dit.

Cette réalisation se présente comme un écho, moins achevé et quelque peu scolaire, du film de Mike Leigh ANOTHER YEAR, ce qui n’empêche pas de l’apprécier, bien au contraire. Point de vue de femme, ce film soulève bien des questions que les spectateurs garderont en mémoire, soit parce qu’ils font face à des défis analogues à ceux que rencontrent Mary et Adam, soit parce qu’ils ont l’âge de leurs enfants et sont quelque peu inquiets de la façon dont leurs parents semblent aborder cette étape de leurs existences.

Note: 15

Serge Molla