Jeu de l'amour et du hasard (Le)

Affiche Jeu de l'amour et du hasard (Le)
Réalisé par Elena Hazanov
Pays de production Suisse
Année 2011
Durée
Genre Comédie
Distributeur PointProd
Acteurs Jennifer Peedom
N° cinéfeuilles 635

Critique

La réalisatrice Elena Hazanov et le metteur en scène Jean Liermier, directeur du Théâtre de Carouge, ont réédité l’expérience réussie en 2008 avec «Les Caprices de Marianne» d’Alfred de Musset: non pas filmer la pièce, d’abord jouée sur les planches, mais transposer, en seconde intention, une intrigue à l’écran, en conservant les dialogues originaux et en confrontant les acteur(-trice)s à la dimension cinématographique. On se laisse aisément captiver par ces «jeux» qui reposent sur un double travestissement.

Le comique naît non seulement des subterfuges et des quiproquos, mais surtout du décalage entre le langage précieux du XVIIIe siècle et l’archimodernité du lieu où se meuvent les personnages. Les chassés-croisés amoureux se nouent dans une villa sur la Riviera genevoise, dotée d’une piscine intérieure, d’un jacuzzi, d’une cabine de sauna, d’un bassin en plein air ainsi que d’un système de vidéosurveillance tous azimuts. Silvia (Alexandra Tiedemann) et Dorante (Joan Mompart) sont fiancés par leurs pères sans s’être jamais rencontrés. La fille d’Organ (Alain Trétout), le propriétaire de la demeure, désirant sonder, à son insu, le caractère et le comportement de son promis, procède à un échange de robes avec Lisette (Dominique Gubser), sa femme de chambre. Contrairement à son père et à son frère Mario (Cédric Dorier), elle ignore que le jeune homme a conçu un stratagème identique et qu’il se présentera dans la livrée d’Arlequin (François Nadin), sous le nom de Bourguignon. Silvia, à qui déplaît foncièrement le faux Dorante, aux manières plutôt frustes, se sent d’emblée attirée par le charme et la prestance du prétendu valet. Le chauffeur de Dorante, lui, avoue sa flamme à la servante qu’il prend pour la riche héritière. La belle domestique ne repousse pas ces avances assidues...

A la fin, tout rentre-t-il vraiment dans «l’ordre»?... Pour contourner la censure, Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux avait conféré une tonalité burlesque à sa critique des rapports sociaux qu’il estimait injustes. «Le jeu de l’amour et du hasard» de 1730, sans doute son chef-d’œuvre, égratigne les préjugés sur le bonheur et le «mérite», dissociables, selon lui, du rang et de la fortune. Un tel propos avait déplu à nombre de ses contemporains. Aujourd’hui, ne s’agit-il plus que d’un aimable divertissement délesté de sa charge subversive? Le long métrage fut projeté, les 21 et 24 janvier derniers, dans le cadre des 46es Journées soleuroises.

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