Revenge - In a Better World

Affiche Revenge - In a Better World
Réalisé par Susanne Bier
Pays de production Danemark, Suède
Année 2010
Durée
Musique Johan Söderqvist
Genre Drame
Distributeur Equation
Acteurs Mikael Persbrandt, Ulrich Thomsen, Trine Dyrholm, Markus Rygaard, William Jøhnk Nielsen
N° cinéfeuilles 633
Bande annonce (Allociné)

Critique

La réalisatrice danoise explore la violence enfantine. Ses personnages sont très forts et ses questions passionnantes, mais son récit ne laisse pas assez de place à la suggestion.

Bouleversés par des épreuves qui les dépassent, Christian (William Jøhnk Nielsen) et Elias (Markus Rygaard) sont projetés trop tôt dans l’adolescence. Le premier n’accepte pas la mort de sa mère dont il rend son père (Ulrich Thomsen) responsable. Le second, qui doit assumer la séparation de ses parents Marianne et Anton (Trine Dyrholm et Mikael Persbrandt), se referme et se fait écraser à l’école. Il se sent d’autant plus seul que son père, médecin, passe de longues semaines dans un camp de réfugiés, en Afrique. Le hasard place les deux garçons dans la même classe. Ils deviennent amis. D’abord, la violence de Christian protège Elias, puis elle l’inquiète; jusqu’à quel point peut-il l’accepter?

Réalisatrice danoise, Susanne Bier a abandonné les règles de «Dogma» qu’elle avait adoptées à ses débuts. Depuis, elle a notamment signé BROTHERS (2004), belle œuvre qui fait entrer dans une famille danoise l’horreur de la guerre d’Afghanistan. La voici qui présente un nouveau drame, très esthétique, qui lie dans un même scénario différentes situations de violences: l’école, l’enfance, le deuil, la mésentente parentale… Toutes se trouvent soumises au même questionnement: comment éduquer ses enfants, comment leur parler, que leur dire quand l’âge les rend péremptoires comme Christian, ou introvertis comme Elias? Et puis, une autre violence se greffe aux premières, celle d’une région africaine dominée par la corruption et la haine tribale.

Il n’y a pas de doute quant au talent de la réalisatrice danoise lorsqu’il s’agit de construire des personnages forts. Aidée ici par des acteurs remarquables, elle adopte le plus souvent le point de vue des enfants et explore à fond la complexité du problème, sans juger personne, montrant combien chacun se débat dans ses propres dilemmes. Christian, par exemple, qui confond pacifisme et lâcheté. Ou Elias, pour qui posséder (ou non) le couteau avec lequel il pourra se défendre, est un véritable enjeu. Mais aussi Anton, confronté à son devoir de médecin quand il se retrouve face à un criminel de guerre. Et encore sa femme, lorsqu’elle s’interroge sur la viabilité de son couple. Que faire? Quel parti prendre? Les cas de conscience sont exigeants et les réponses difficiles. C’est à cet égard que le film dégage sa puissance.

Il est moins convaincant quant au récit, souvent trop explicité, guetté par l’anecdotisme. Pourquoi, par exemple, avoir greffé la partie africaine - et sa musique ostentatoire - sur la grave expérience vécue au Danemark par les deux garçons. Pour justifier l’absence d’Anton au moment le plus significatif? Pour montrer que les adultes aussi sont confrontés à la violence? Que celle-ci se reproduit partout? Certes, les scènes africaines ne manquent pas d’intérêt… mais pour un autre tournage, dans lequel elles développeraient pleinement leur sens. Ici, elles distraient le film de la direction qui lui convient le mieux, la relation éducative entre parents et enfants et le questionnement de soi qu’elle inspire aux adultes.

REVENGE - IN A BETTER WORLD, qui a gagné l’Oscar 2011 du meilleur film en langue étrangère, souffre aussi d’une fin insistante, là où la suggestion aurait laissé à l’œuvre une part de mystère et au spectateur, un travail d’imagination. Mais il reste que ce film porte honnêtement et avec beaucoup de sensibilité la gravité de son sujet. Plusieurs séquences sont bouleversantes et leurs échos résonnent longtemps dans la mémoire.

Note: 15

Geneviève Praplan